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"Les prisons sont de vraies passoires": malgré les annonces de Darmanin, les syndicats dubitatifs

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Gérald Darmanin, désormais ministre de la Justice, multiplie les déplacements et les annonces depuis sa nomination. Encore dimanche, le garde des Sceaux a dit vouloir s'attaquer aux narcotrafiquants en prison en plaçant 100 d'entre eux à l'isolement renforcé. Il veut également organiser des fouilles anti-téléphone à grande échelle. Que des bonnes idées disent les syndicats pénitentiaires, mais encore faut-il avoir les moyens de ses ambitions.

Nommé le 23 décembre, le nouveau ministre de la Justice Gérald Darmanin multiplie les déplacements et les annonces. Dimanche, à l'occasion d'une rencontre avec magistrats, greffiers et avocats au tribunal judiciaire de Paris, le garde des Sceaux a évoqué une nouvelle piste pour lutter contre le narcotrafic et notamment les narcotrafiquants à la tête d’importants réseaux malgré leur détention.

Des annonces pour tenter de pallier les difficultés des agents pour lutter contre les narcotrafiquants en prison. La première de ces difficultés dénoncées par les syndicats de surveillants pénitentiaires, c’est la suppression en 2009 des fouilles systématiques sur les détenus. Avant cette date, une palpation avait lieu après chaque contact avec le monde extérieur.

Aujourd’hui, c’est fini et c’est donc par exemple via les parloirs que les téléphones entrent en prison, mais aussi par des drones. Et là encore, les agents se disent impuissants face à ces nouveaux modes de livraison.

Alors l’administration pénitentiaire a décidé d’équiper les établissements de brouilleurs pour empêcher les téléphones d’émettre. Mais ces appareils sont chers, il n’y en a pas assez et leur utilisation est parfois inadaptée aux centres. Face à cela, les syndicats demandent plus de personnel et plus de place, des mesures plus longues à installer.

Les syndicats perplexes

Alors ces annonces ont retenu l’attention des syndicats pénitentiaires sans pour autant les bercer d’illusions.

"Nous attendons de le rencontrer, parce qu'il y a beaucoup d'annonces, beaucoup d'idées mais la réalité va-t-elle être la même ? Nous n'en somme pas vraiment convaincus. Aujourd'hui quand on nous parle de mettre tous les narcotrafiquants dans les quartiers d'isolement, alors qu'aujourd'hui ces quartiers comme l'ensemble des prisons débordent. Donc on va se heurter à un problème de place pour commencer", assure Emmanuel Chambaud, secrétaire général du syndicat UFAP – Unsa Justice, invité sur RMC ce lundi.

Le parti-pris : Prisons, Darmanin cible les narcotrafiquants - 30/12
Le parti-pris : Prisons, Darmanin cible les narcotrafiquants - 30/12
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"Pour pouvoir faire des saisies, il faut le personnel"

En effet, si les syndicats partagent le même constat que Gérald Darmanin sur les problématiques en prison, sans moyens humains supplémentaires, Christy Nicolas, secrétaire général du syndicat pénitentiaire des surveillants, ne voit pas comment ces annonces peuvent aboutir.

“Les prisons sont de vraies passoires. Pour pouvoir faire des saisies, il faut le personnel. À l’heure d’aujourd’hui vu qu’il manque 5.000 agents sur l’ensemble de la France, ce serait très difficile à mettre en place. Nous, on voudrait y croire, mais aujourd’hui il faudrait des moyens considérables, colossaux pour pouvoir juguler tout ça”, appuie-t-il.

S’agissant de l’isolement de 100 plus gros narcotrafiquants incarcérés, voulu par le ministre là encore le syndicat pointe le manque de moyens.

“Trois-quarts des places de l’isolement, voire même 90%, sont déjà occupées, donc je ne vois pas comment vous pourriez mettre une centaine de détenus narcotrafiquants en plus en isolement”, indique-t-il.

Sans une augmentation d’un tiers du budget de la Justice, le syndicat pénitentiaire des surveillants estime ces objectifs inatteignables.

Pierre Bazin avec Guillaume Descours