Logement social: prison ferme pour une agente de la Ville de Marseille, condamnée pour corruption

Cadeaux, parfums et bakchichs contre logements sociaux: une adjointe administrative de la Ville de Marseille a été condamnée lundi 25 mars à quatre ans de prison, dont 18 mois avec sursis pour une vaste affaire de corruption dont elle était la tête de réseau.
Pour ces deux ans et demi de prison ferme, le tribunal a décerné à l'encontre de la prévenue un mandat de dépôt différé, le temps qu'elle puisse prendre "ses dispositions avant l'incarcération". Le tribunal correctionnel de Marseille l'a également condamnée à 20.000 euros d'amende et à une interdiction définitive d'exercer une fonction publique, avec effet immédiat.
Une quarantaine de victimes
Durant quatre ans, de 2016 à 2019, Rosina Livolsi, 52 ans, en poste au service logement de la mairie des 2e et 3e arrondissements de Marseille, avait encaissé pour plus de 40.000 euros de bakchichs (pot-de-vin, ndlr) et de nombreux cadeaux en faisant miroiter à des demandeurs la possibilité d'obtenir un logement social.
"Vous avez durablement entamé la confiance des citoyens dans leurs institutions de proximité et vous avez porté atteinte au pacte social, dans un quartier, dans une ville où ce pacte social est particulièrement questionné et remis en cause", a expliqué à la prévenue la présidente du tribunal Azanie Julien-Rama. Le procureur avait requis cinq ans de prison ferme, 50.000 euros d'amende et un mandat de dépôt immédiat.
Une quarantaine de victimes avaient été recensées, "des personnes en grande précarité car vivant dans des logements insalubres, parfois avec des enfants en situation de handicap, victimes de violences intrafamiliales ou d'une insécurité liée aux trafics", a observé le tribunal.
"Vous avez profité de la vulnérabilité de ce public, dans un quartier de Marseille parmi les plus pauvres de France, voire d'Europe", a insisté la présidente.
Les juges ont justifié leur sévérité par "le rapport au mensonge" de la prévenue et "sa totale incompréhension de ce que signifie la mission de service public". Elle avait ainsi avoué au tribunal ne pas voir de problème à favoriser certains dossiers. A l'audience, elle avait encore revendiqué le surnom de "Mère Teresa du 2e arrondissement", disant avoir agi "par empathie, pour aider les gens".
4.000 euros de dommages et intérêts à la Ville de Marseille
Écartée en 2017 du service logement, Rosina Livolsi avait continué son escroquerie via des complices se faisant passer pour des employés de bailleurs sociaux. L'employée municipale, qui ne payait plus son loyer depuis des années, avait assuré s'être retrouvée dans "une spirale" de surendettement.
Son fils, dans une totale dépendance financière de sa mère, et son ex-belle fille, ont eux été condamnés pour recel à deux ans de prison avec sursis et à des amendes de respectivement 20.000 et 10.000 euros.
Contre quatre autres complices, les peines sont de neuf et dix-huit mois de prison avec sursis. Six intermédiaires jouant les rabatteurs pour Rosina Livolsi ont eux été condamnés à des peines s'échelonnant d'un an de prison avec sursis à deux ans de prison dont 15 mois avec sursis, la partie ferme étant à purger sous bracelet électronique.
Aucune des victimes de Rosina Livolsi ne s'était constituée partie civile. L'adjointe administrative devra verser 4.000 euros de dommages et intérêts à la Ville de Marseille en réparation de son préjudice moral et diverses sommes à plusieurs bailleurs sociaux.