DSK : l'heure de vérité

Audience décisive pour Dominique Strauss-Kahn ce lundi à New-York. L’accusation va enfin présenter ses preuves et la défense de DSK va dire s’il plaide coupable ou non coupable. Au fond, ça fait 3 semaines qu’on navigue dans le flou.

On ne cessera de le rappeler: pour le moment, on ne sait rien. C’est la procédure américaine. La police est au service et aux ordres de Cyrus Vance, le procureur du comté de New-York. C’est la première grosse affaire de Cyrus Vance depuis son élection en 2009. Et l’opinion publique américaine attend de lui des résultats. Son slogan électoral, « la justice doit traiter tout le monde de la même manière », trouve dans l’affaire DSK une application concrète. Cyrus Vance, l’homme qui a mis à terre l’un des hommes les plus puissants de la planète, aurait alors droit à un destin politique national. Ce procureur ne recule devant rien. On sait qu’il a déjà joué avec la loi, en allant arrêter DSK dans son avion, en faisant mentir les policiers pour que DSK accepte de sortir de l’avion et soit arrêté. En faisant croire aussi qu’il cherchait à s’enfuir, alors qu’il prenait un avion réservé de longue date.

DSK lui-même ne connaît pas encore les éléments de preuve rassemblés par l’accusation. Traces ADN, témoignages, enregistrements vidéo : on a dit tout et n’importe quoi depuis 3 semaines...

Même chose pour le témoignage de Nafissatou Diallo. Personne, à part la police, n’a entendu sa version. La police n’en a dit que des bribes. On a tout vu dans la presse people et tabloïd américaine : des faux témoignages, des fausses confidences, des fausses informations...

Quelle va être la stratégie de défense de DSK ?

Sûrement pas comme l’affirmait encore la presse tabloïd américaine il y a une semaine, une transaction avec la victime. Il va probablement plaider non-coupable tout à l’heure. Pour plusieurs raisons. D’abord parce que plaider coupable réduirait la peine mais ne le dispenserait pas d’une lourde peine de prison. Ensuite parce qu’il suffit d’un doute, il suffit d’un seul membre du grand jury de 12 personnes qui se réunira dans 6 mois, il suffit d’un seul doute de la culpabilité, pour que DSK soit acquitté. Le doute, il peut venir du scénario de l’agression, il peut venir de la personnalité de la victime, de son passé, de sa situation financière, d’une contradiction dans son témoignage.

Deux équipes vont désormais s’affronter ?

Le procureur a une équipe de 500 personnes et un budget de 75 millions de dollars. Il a nommé 6 procureurs pour s’occuper de l’affaire DSK, baptisés les "Top Gun". DSK a recruté des experts du contre-espionnage, de la CIA, d’anciens dirigeants des services secrets du président américain, d’anciens diplomates. Mais à la fin, devant les 12 membres du jury, ce sera la parole de DSK contre celle de Nafissatou Diallo.

Et que se passerait-il s’il était acquitté ? A-t-il un avenir politique en France ?

Imaginez que dans 6 mois, à la fin de cette année ou au début 2012, il soit acquitté par le grand jury. Imaginez le nouveau cataclysme politique en France. Que fera alors DSK ? Difficile pour lui de retrouver une mission à l’international, de faire oublier l’affaire, même s’il est acquitté… S’il souhaite prendre sa revanche, ce sera forcément en France. C’est là que, fort d’un statut d’acquitté, il pourrait éventuellement revenir en force. La présidentielle 2012 ca semble quand même peu probable. Le PS aura un candidat investi et on voit mal DSK remettre en cause le processus enclenché aux primaires.

Mais en politique on n’est jamais vraiment mort ?

Souvenez-vous du François Mitterrand, victime du faux attentat de l’Observatoire en 1961. Souvenez-vous du Jacques Chirac de 1994, marginalisé par Edouard Balladur.
DSK est à terre aujourd’hui. Mais dans l’hypothèse d’un acquittement, qui peut dire quels seront ses ressorts les plus intimes ?

Ecoutez ci-dessous « Les coulisses de la politique » de ce lundi 6 juin 2011 avec Christophe Jakubyszyn et Jean-Jacques Bourdin :

Christophe Jakubyszyn