"Du gaspillage": la construction des nouveaux ministères de la Santé et du Travail fait polémique
Malakoff, commune de 30.000 habitants au sud de Paris et limitrophe de la capitale, est une ancienne ville industrielle aujourd’hui résidentielle. Elle est connue pour son tripode: un gigantesque bâtiment de verre et de béton de 50 mètres de haut, en forme d’étoile à trois branches. C’est l’entrée de la ville, qui jusqu’en 2018 abritait l’Insee, l’institut de la statistique. Aujourd’hui, le bâtiment est complètement vide. Et son avenir déchire la commune.
Le bâtiment appartient à l’Etat, qui veut tout détruire pour tout reconstruire, afin d’y installer ses ministères sociaux: la Santé, les Solidarités et le Travail. Les travaux ont déjà commencé.
"On démolit 45.000 tonnes de béton pour reconstruire 45.000 tonnes de béton"
Mais une association, “In C’Malakoff”, se bat depuis plusieurs mois pour la préservation de la Tour. Dominique Cordesse, vice-présidente de l’association, dénonce une aberration écologique.
"On démolit 45.000 tonnes de béton pour reconstruire 45.000 tonnes de béton ! Ca ne veut rien dire. C'est du gaspillage d'espace, d'énergie, de ressources. Pour faire du béton, il faut du sable. On déshabille la planète pour un bâtiment qui ne veut rien dire. Il y a toujours des solutions pour ne pas démolir. Il y a des solutions pour restructurer, mais on ne casse pas", lance-t-elle.
La pétition en ligne “Non à la démolition de la tour Insee à Malakoff” a d'ailleurs recueilli plus de 18.000 signatures.
20% de CO2 en plus pour une destruction
L’Etat avance que son nouveau bâtiment sera plus fonctionnel et surtout qu’il sera exemplaire en terme environnemental. Mais on a voulu vérifier. L’Etat a mené une vaste étude, pour comparer les coûts et les effets d’une réhabilitation contre une destruction/reconstruction. Nous nous sommes plongés dans les 45 pages de cette enquête. Conclusion: les travaux de démolition émettront au moins 20% de CO2 de plus qu’une réhabilitation.
Et même si un bâtiment neuf présente de meilleures performances énergétiques à long terme, ça ne compensera pas toutes ces tonnes d’émissions de gaz à effet de serre. Pour ces raisons, la maire de Malakoff, Jacqueline Belhomme, soutient aujourd’hui l’association et demande, elle aussi, la réhabilitation. Mais l’Etat fait la sourde oreille.
"L'Etat, au final, décide d'aménager notre entrée de ville. Bien sûr, il est chez lui dans sa parcelle, mais ça reste notre entrée de ville. C'est pour les 50 ans à venir, sans prendre en considération ce que veulent les habitants d'aujourd'hui. Il y a un déni complet de ce que veulent les habitants et la ville", reproche-t-elle.
Que répondent les services de l'Etat? Les ministères sociaux assument. Oui, leur projet émettra plus de CO2. Mais à long terme, il devrait coûter moins cher. Par ailleurs, selon l’Etat, un nouveau bâtiment sera plus facile à aménager, et livré plus vite.
Une réponse qui ne satisfait ni la mairie, ni l’association. Ils organisent une délégation devant le ministère de la Transition écologique le 11 avril, où ils espèrent enfin être reçus.