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Emmanuel Macron ne fixe "aucune limite" au soutien à l'Ukraine, selon les oppositions

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Emmanuel Macron a reçu les chefs de parti le 7 mars pour discuter du conflit en Ukraine en amont d'un vote parlemenaire. Selon les responsables du PCF et du RN, le chef de l'Etat ne fixe "aucune limite", "aucune ligne rouge", au soutien français à Kiev.

Les discussions s'annonçaient tumultueuses. Emmanuel Macron a accueilli le jeudi 7 mars les responsables de parti pour évoquer le conflit en Ukraine, alors qu'un vote parlementaire se profile sur le sujet. Selon Fabien Roussel (PCF) et Jordan Bardella (RN), le président de la République a expliqué qu'il n'y avait "aucune limite", "aucune ligne rouge" au soutien de la France à l'Ukraine, en guerre contre la Russie,

Le président du RN, Jordan Bardella, a assuré avoir plaidé lors de cette réunion de près de trois heures pour que "la France n'entre pas elle-même en guerre avec la Russie". L'envoi éventuel de troupes occidentales au sol ou l'appel à ne pas "être lâches" récemment défendus par Emmanuel Macron sont, pour le responsable d'extrême droite, "des positions de va-t-en-guerre" et suscitent, selon lui, "l'inquiétude dans le pays".

Il a par ailleurs dit à Emmanuel Macron qu'il était "irresponsable" de comparer le RN à "une armée d'occupation étrangère", en allusion aux récentes déclarations de Gabriel Attal.

Le patron des communistes Fabien Roussel a de son côté regretté en sortant de l'Elysée que deux ans après l'invasion russe de l'Ukraine "la position de la France a changé: il n'y a plus de lignes rouges, plus de limites".

Selon la cheffe des Écologistes Marine Tondelier, le chef de l'État a expliqué que "comme nous avions en face de nous Vladimir Poutine, qui manifestement est sans limite", s'en "fixer nous-mêmes", "intérioriser des limites" serait "lui donner un avantage comparatif".

Elle a jugé "extrêmement inquiétant de voir un président de la République français qui explique, face à quelqu'un qui détient l'arme nucléaire que nous détenons nous-mêmes, qu'il faut montrer que nous sommes sans limite".

"Je suis arrivé inquiet et je suis ressorti plus inquiet encore puisque le président de la République, loin de revenir sur les déclarations qui étaient les siennes la semaine dernière, les a confirmées", a relevé de son côté le coordinateur politique de La France insoumise, Manuel Bompard.

Quant au président des LR, Éric Ciotti, il a dénoncé "une instrumentalisation aux fins de campagne électorale pour les élections européennes".

"Plus de mesure"

Auparavant, les oppositions avaient unanimement dénoncé les propos "irresponsables" du président sur la possibilité d'envoyer des militaires sur le terrain. Le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard, a déclaré devant la presse à son arrivée à l'Elysée qu'il invitait le président à "un peu plus de mesure", déplorant un discours qui a "décrédibilisé", "isolé" et "affaibli" la France.

Les positions d'Emmanuel Macron ont été pointées du doigt en raison de leurs conséquences à l'échelle mondiale. Le patron des socialistes Olivier Faure a accusé le chef de l'Etat d'avoir réalisé "l'unité de tous" les Occidentaux "contre la France" et offert "une clarté inédite" à Vladimir Poutine sur le fait "qu'aucun de ces pays n'a envie d'engager de troupes au sol".

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La cheffe des Ecologistes Marine Tondelier pointe une "déclaration viriliste" et "un problème d'amateurisme", tandis que Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a estimé qu'Emmanuel Macron avait fait "le jeu du Kremlin" en "étalant au grand jour les divisions de l'Europe".

A quelques semaines des élections européennes, le chef de l'Etat assume le clivage provoqué par le dossier lié à la guerre en Ukraine.

Un président qui "instrumentalise" la guerre

Alors que la liste d'extrême droite menée par Jordan Bardella se positionne largement en tête dans les sondages, Emmanuel Macron a demandé à ses ministres de se "battre pied à pied" dans la camapgne des européennes de son camp qui sera lancée le 9 mars lors d'un meeting à Lille. "Ne laissez pas entrer les nationalistes. Ils étaient déjà la guerre. Ils sont désormais la défaite face à la Russie", a-t-il martelé devant son gouvernement.

De son côté, Gabriel Attal a accusé le RN de "soutenir davantage la Russie que l'Ukraine", lors d'un déplacement à La Haye.

En réponse, Olivier Faure a déclaré que la France a "un président qui, malheureusement, comme toujours, joue" pour "instrumentaliser la guerre" et "aborder les élections européennes avec les habits d'un chef de guerre", ajoutant que "c'est pas une Game Boy, en fait, la France".

Emmanuel Macron, qui a promis de se rendre en Ukraine avant la mi-mars s'est aussi entretenu le 6 mars avec ses prédécesseurs François Hollande et Nicolas Sarkozy. Il doit présenter à huis clos aux responsables des partis les résultats de la conférence internationale pour amplifier le soutien militaire à l'Ukraine organisée la semaine dernière à Paris.

La stratégie française fera ensuite l'objet d'un débat, suivi d'un vote, au Parlement, le 12 mars à l'Assemblée nationale et le 13 mars au Sénat. Au-delà des dissensions autour de l'accord bilatéral, le débat s'annonce agité en raison des récentes déclarations d'Emmanuel Macron, qui a aussi appelé les alliés occidentaux à ne pas "être lâches", renforçant la colère de l'Allemagne.

Si les Ecologistes et le Parti socialiste hésitent, le reste de la gauche penche pour une opposition franche. "Pour nous, c'est non. Il est hors de question de livrer à l'Ukraine des missiles de longue portée qui prendraient le risque que la France, demain, devienne engagée contre la Russie", a déclaré le dirigeant communiste Fabien Roussel.

M.H avec AFP