François Hollande fait du surplace

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC. - -
Jusqu'ici, on a surtout comparé François Hollande à la tortue de la fable : celle qui part tout doucement mais avec beaucoup d'avance et qui chemine tranquillement jusqu'à l'arrivée sans être rattrapée parce que le lièvre l'a sous-estimée. Maintenant, François Hollande s'est changé en papillon. Parce que son statut de favori a tendance à lui donner une certaine légèreté ; et aussi parce qu'il volette d'un sujet à un autre sans jamais vraiment s'arrêter. Là où Nicolas Sarkozy s'efforce d'imprimer des idées nouvelles dans la campagne - avec un succès mitigé, d'ailleurs -, lui, François Hollande, se contente d'effleurer, de suggérer. De cette façon, il ne prend le risque de s'exposer à la critique sur aucun sujet. Politiquement, ça veut dire qu'il cherche des thèmes fédérateurs. Arithmétiquement, ça veut dire qu'il gère son avance.
Hier, il a reçu les familles des victimes de l'attentat de Karachi. Ça entre dans cette stratégie ?
C'est un très bon exemple. D'abord, il les reçoit parce que Nicolas Sarkozy, lui, a refusé de les rencontrer. Donc il joue sur du velours. Surtout, il a promis hier que s'il était élu, il lèverait le secret défense sur l'ensemble de cette affaire "à condition que cela ne mette pas en danger la sûreté de l'État". Les victimes sont ravies d'entendre cela mais, concrètement, ça signifie qu'il ferait la même chose que ce qu'a fait le gouvernement depuis trois ans puisque la quasi-totalité des documents qui ont été demandés par la justice dans cette affaire ont déjà été déclassifiés. Donc ça ne lui coûte pas grand-chose de le dire, mais électoralement, c'est positif.
François Hollande a aussi promis ce week-end de retirer le mot "race" de la Constitution. Une bonne idée ?
C'est surtout un gadget de campagne. Tout le monde se moque de savoir que le mot "race" figure dans la Constitution - c'est d'ailleurs pour affirmer l'égalité des citoyens "sans distinction d'origine, de race ou de religion". C'est un texte qui est issu de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. On peut trouver qu'il est anachronique, mais on ne voit pas bien en quoi il y aurait urgence à le supprimer. Ou alors, on pourrait aussi proposer de réécrire les paroles de la Marseillaise ! C'est le comble du politiquement correct. En réalité, il serait sûrement plus utile, plus salutaire, plus démocratique d'abolir l'article 16 - qui donne les pleins pouvoirs au président en cas de crise grave - mais cela, François Hollande ne le propose pas - ni personne d'autre d'ailleurs.
Il reste quand même la fameuse taxe sur les plus riches, que François Hollande veut imposer à 75 % au-delà de 1 million d'euros par an. Cette proposition-là a marqué les esprits...
Incontestablement, mais à tort. Tous les experts (y compris de gauche) ont montré que cette mesure ne rapporterait presque rien et François Hollande a expliqué lui-même qu'elle avait surtout une visée symbolique. L'histoire retiendra que c'est une idée qui ne figurait pas dans son projet de candidat et qui est à peu près sans effet qui aura été son meilleur coup de campagne. Je ne suis pas sûr que ce soit complètement rassurant.
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