Il remixe les discours politiques en musique: "Macron, je suis sûr qu'il n'est pas fâché"

- - capture écran YouTube
"Cette pratique existe aux Etats-Unis depuis une dizaine d'années. On retrouve ça aussi en Russie, au Brésil, en Espagne. C'est une forme de caricature bien installée dans ces pays-là. En France, ça commence à s'installer mais les gens ne connaissent pas trop. Ils pensent que c'est juste un doublage de la voix. Mais en réalité c'est une forme de caricature. Moi, j'ai commencé il y a un peu plus d'un an avec Jean-Luc Mélenchon notamment. Mais le mix qui m'a bien fait connaître c'est le 'clash' entre Dominique Dord et Bernard Cazeneuve.
Mon rêve est que cette pratique s'installe durablement en France, que ça fasse parti du patrimoine culturel. Peut-être que ça ne sera pas avec moi, que ça sera sous d'autres générations. Peut-être qu'eux auront plus de boulot… Moi je débute, je suis à l'origine du truc.
"En moyenne, 30 heures de travail"
Le choix du discours n'est pas si simple parce que la langue française est assez complexe. Tout n'est pas exploitable. Je choisis ce qui m'inspire. Quand il y a des situations où il se passe des choses, que les traits sont grossis, quand je sens que je peux immortaliser le moment en musique. Mais il faut que ce soit autant visuel que musical. Il faut que ce soit décalé, humoristique mais avec une vraie performance musicale. Sinon le rendu ne sera pas bon. Pour que ça soit exploitable, l'auto-tune fonctionne mieux sur des syllabes portées et longues.
Par exemple, j'ai essayé de travailler sur le 'Moi président' de François Hollande. Ça n'a pas été possible de faire quelque chose parce qu'il mâche ses syllabes, il parle vite et pas très distinctement. En moyenne, je passe quand même 30 heures derrière mon ordinateur avant de mettre en ligne la vidéo. Il faut entendre la tonalité, définir le rythme, donner une cohérence car il ne faut pas déformer ce que la personne dit au départ. Après il faut faire le mastering, trouver une musique instrumentale ou la créer. Tout ça prend un peu de temps. Si je n'étais pas musicien, je n'aurais pas pu faire ça. Il faut caler le son dans le bon tempo, la bonne mesure, la bonne tonalité.
"Ça se passe au feeling"
Par exemple pour faire le mix d'Emmanuel Macron, comme je n'arrêtais pas de recevoir des messages de membres de ma communauté (en moyenne 1,7 million de vues par mois sur YouTube, 118.000 abonnés et 56.000 followers sur Facebook), je me suis dit qu'il y avait quelque chose à faire. Quand je l'ai vu, je pensais le faire mais je ne pensais pas que j'allais faire du heavy metal. En fait, au départ, je ne choisis pas vraiment le rythme de la musique. Ça se passe au feeling. Pour Macron, il y avait quelque chose à tirer de cette scène. Il est candidat à l'élection présidentielle, peut-être le futur président de la République, et il hurle sur scène. Je me suis dit que j'allais le caler sur un son rock, rendre le truc épique. Un vrai bonheur.
Il n'y a pas de fréquence particulière mais, en moyenne, je fais deux-trois vidéos par mois. Et en aucun cas je tiens à faire passer de message politique. Il y a deux personnes en moi. D'un côté l'artiste qui fabrique et qui se fout du message. Et il y a le Khaled de tous les jours qui adhère à certaines choses. Mais ça n'entre pas dans le cadre de mon travail. Je sépare bien les deux. Je prends ce que les politiques disent. Je ne modifie rien. Je ne triche pas. Si une personne a dit des bêtises, ça ne me concerne pas.
"Les politiques le prennent plutôt bien"
De même, je ne choisis pas la musique. Je prends la musique qui s'adapte le mieux à la tonalité, l'émotion qui se dégage. Ce n'est pas un choix politique de mettre du rap derrière Mélenchon ou du heavy metal pour Macron. C'est seulement artistique. Je ne juge pas sur le fond mais sur la forme. J'ai eu quelques retours des politiques concernés. Jean-Luc Mélenchon, par exemple, a commenté la vidéo sur YouTube en signant 'MC Mélenchon' comme les rappeurs. Dominique Dord m'a récemment fait un clin d'œil sur Twitter. Au moment de féliciter Bernard Cazeneuve pour sa nomination à Matignon, il a écrit 'Mais c'est pas de votre faute'.
Ils le prennent donc plutôt bien. De toute façon, j'ai pour objectif de ne manquer de respect à personne. Donc tout le monde en rigole. Même Macron, je suis sûr qu'il n'est pas fâché. J'ai d'ailleurs une version rap et une version électro de son discours. Mais personne ne les verra…"