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"Mayotte debout": François Bayrou dévoile son plan pour l'archipel dévasté par le cyclone Chido

Le Premier ministre français François Bayrou à Mayotte, le 30 décembre 2024.

Le Premier ministre français François Bayrou à Mayotte, le 30 décembre 2024. - JULIEN DE ROSA / AFP

Empêcher la reconstruction des bidonvilles, rétablir l'électricité "dans chaque foyer" d'ici fin janvier: François Bayrou a annoncé lundi une batterie de mesures lors de sa visite à Mayotte, deux semaines après le passage du dévastateur cyclone Chido.

Rétablissement de l'eau et l'électricité, fin des bidonvilles, aides aux entreprises ou encore surveillance des établissements scolaires: voici les principales mesures du plan "Mayotte debout" présenté lundi par le Premier ministre François Bayrou.

Une loi d'urgence sera présentée en Conseil des Ministres vendredi, puis soumise "sous 15 jours" au Parlement. Un établissement public de refondation de Mayotte, sur le modèle de celui de Notre-Dame, sera créé avec la désignation d'une personnalité à sa tête également vendredi.

Électricité

Le chef du gouvernement souhaite que l'électricité soit rétablie dans "chaque foyer" à Mayotte d'ici la fin janvier. Pour atteindre cet objectif, Electricité de Mayotte (EDM) recevra un renfort de 200 agents. En attendant, 200 groupes électrogènes seront mis à disposition pour "le fonctionnement des équipements indispensables".

Vingt techniciens EDF seront envoyés en renfort pour constituer des "commandos", chargés avec les communes et EDM de repérer les ruptures de réseau basse tension, puis d'intervenir.

Eau

L'armée interviendra pour aider les équipes locales "sur le réseau de distribution de l'eau, la remise en état du réseau routier et des constructions détériorées".

Dès la fin de cette semaine, le volume de production d'eau potable atteint sera de 38.000 m3 par jour, soit celui d'avant Chido. Avec le plan "Mayotte Debout", le gouvernement prévoit d'atteindre d'ici le 30 juin, une production de 40.000 m3 par jour. Il est prêt à augmenter les moyens du plan Eau Mayotte, qui prévoyait 60 millions d'euros d'investissements en 2025, "en fonction des besoins".

Télécommunications

Pour assurer les communications en urgence, le déploiement de 200 Starlinks (systèmes de liaison satellite de la société américaine SpaceX) sera effectué. Une "solution 5G" devra être déployée d'ici fin juin 2025. Dans les deux ans, un réseau de fibre optique sera déployé avec un appui financier public de 50 millions d'euros.

Logement

Un plan d'urgence est lancé pour la mise au sec des bâtiments publics et des résidences des Mahorais. L'État s'engage à livrer "dans la semaine" 140 tonnes de bâches, s'ajoutant aux 100 tonnes de bâches déjà livrées. Des éléments de charpentes métalliques et des tôles seront acheminés en urgence "et seront inclus dans la liste de produits à prix bloqués".

Les Mahorais pourront disposer de prêts garantis par l'Etat, assumés par la Banque des territoires, qui seront accordés "dans des conditions exceptionnelles réservées aux catastrophes naturelles de grande ampleur comme Chido". Les bénéficiaires disposeront de 5 années de différé d'amortissement, soit 0 euros par mois pendant cette période, puis de 25 années de remboursement, avec une mensualité moyenne de 6 euros par mois pour 1.000 euros empruntés. L'État et les pouvoirs publics locaux s'accordent pour "interdire et empêcher la reconstruction des bidonvilles".

Écoles

La rentrée prévue le 13 janvier "aura lieu selon les modalités adaptées, établissement par établissement", a indiqué François Bayrou. "Une scolarisation temporaire dans l'Hexagone pourra être organisée" pour ceux qui le souhaiteront. François Bayrou a rappelé que la France l'avait fait pour l'Ukraine. À Mayotte, des "tentes-école" seront montées cette semaine "pour les premiers besoins".

Un plan d'attractivité et de fidélisation des enseignants sera lancée, tout comme un plan "Volontaires Écoles Mayotte" pour pallier le manque d'enseignants en faisant appel à "des étudiants, des retraités, des enseignants volontaires".

Sécurité

Le plan prévoit la formation de 300 gendarmes et policiers auxiliaires mahorais pour assister les unités locales. Les patrouilles aériennes et maritimes seront renforcées et des drones seront utilisés pour "assurer le respect des frontières". Un plan vigilance opéré par des forces de l'ordre sera proposé au président Emmanuel Macron afin d'assurer la sécurité, notamment des établissements scolaires.

Santé

Dans un délai de 3 mois, un plan "d'attractivité et de fidélisation" sera lancé, axé notamment sur les médecins, les sages-femmes et "toutes les professions en tension dans le domaine médical".

Transports

Le plan prévoit la réfection de la tour de contrôle de l'aéroport Marcel Henry "pour le rétablissement puis le renforcement du trafic". Les vols commerciaux reprendront à compter du 1ᵉʳ janvier. L'État soutiendra le "rapatriement d'urgence des habitants de Mayotte retenus hors de France à cause de la catastrophe".

Économie

Face aux dégâts colossaux, les cotisations sociales pour toutes les entreprises sont suspendues jusqu'au 31 mars. Sont prévues aussi des aides financières d'urgence pour toutes les entreprises, par compensation de la perte de chiffre d'affaires à hauteur de 20 % du chiffre d'affaires moyen, avec un plafond fixé à 20.000 euros. L'État soutiendra le développement des filières agriculture et pêche et mobilisera des fonds européens pour la reconstruction des installations agricoles.

Objectif: deux ans

"Il ne s'agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était. Il s'agit de dessiner l'avenir de Mayotte, différent", avait expliqué dans la journée François Bayrou, qui a répété son "objectif" de rebâtir Mayotte en deux ans, désireux de "faire mentir la fatalité".

Accompagné de cinq ministres, dont les ministres d'État Elisabeth Borne (Education) et Manuel Valls (Outremer), François Bayrou a notamment visité l'usine de dessalement d'eau de Petite Terre, un hôpital de campagne, une école dont plusieurs salles de classes ont été dévastées, avant de multiplier les rencontres avec les forces vives et les élus de l'île.

Chido, cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé le 14 décembre la mort de 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon un bilan publié dimanche par la préfecture. Concernant le bilan des victimes, François Bayrou a appelé lundi à une "très grande prudence", affirmant que les "rumeurs de milliers de morts" n'étaient "pas fondées" et que les décès se comptaient plutôt en "quelques dizaines ou quelques centaines".

À l'issue de sa visite à Mayotte, François Bayrou se rendra sur l'île de La Réunion, importante base logistique pour l'aide à l'archipel mahorais, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la métropole.

"Dans le sud, dans le nord, on est les oubliés de ce territoire. Ils (les plus hauts responsables politiques) restent toujours à Mamoudzou", déplore une habitante, Marachi Maoulida, "déçue" de cette visite primo-ministérielle d'une journée, mais qui veut rester "optimiste". Présent dans sa délégation, son ministre d'État en charge des Outremer, Manuel Valls, restera deux jours supplémentaires à Mayotte.

C.A avec AFP