RMC

Pour changer la politique, vive les débutants !

-

- - -

Le premier gouvernement Ayrault a été nommé ce mercredi soir. Il comprend 34 membres, dont 17 femmes. Et sans surprise, on y trouve une très large majorité de nouveaux ministres, qui n'ont jamais exercé le pouvoir au sein d'un gouvernement.

Ne jouons pas les pisse-vinaigre : ce que l’alternance apporte de meilleur, c’est le renouvellement du personnel politique, l’émergence de nouvelles figures. Hollande et Ayrault ont eu ce souci. Sur les 34 ministres, seuls 4 l’ont déjà été (Fabius, Moscovici, Lebranchu, Sapin). Ça ne veut pas dire que l’équipe sera forcément faible. Il ne faut pas confondre inexpérience et amateurisme.
Manuel Valls, Marisol Touraine, Vincent Peillon, Arnaud Montebourg sont des politiques chevronnés. Ailleurs, ils auraient été ministres depuis longtemps. La réalité, c’est qu’en France, les alternances sont trop rares – et les carrières trop longues. Quand on fait place aux jeunes, ils sont presque vieux…

D’accord, mais avec un président et un premier ministre qui eux-mêmes n’ont aucune expérience gouvernementale, est-ce qu’il n’y a pas un risque de fragilité ?

Sûrement. Mais ne soyons pas hypocrites : avec un gouvernement de vieux briscards, c’est la sclérose qui menace. Ceux qui critiquent la légèreté des nouveaux arrivants auraient hurlé au retour des morts-vivants si Hollande avait battu le rappel des éléphants du PS – ils auraient eu raison. Ajoutons que les débutants d’aujourd’hui sont les pros de demain. Les Copé, NKM, Pécresse et Baroin sont expérimentés parce que la droite a été au pouvoir pendant des années. Il était temps que leurs homologues de gauche aient aussi leur chance. Jusqu’ici, ils n’avaient que le ministère… de la parole !

François Hollande a quand-même nommé Laurent Fabius, mais pas Martine Aubry. Qu’est-ce qui peut expliquer ce choix ?

C'est plus une question de confort que de sympathie. Il n’apprécie vraiment ni l’un ni l’autre ; mais Fabius est aussi urbain et diplomate que Martine Aubry est intransigeante et cyclothymique. François Hollande a pensé que l’expérience du premier serait utile, et qu’une expérience avec la seconde serait épuisante. Bien sûr, on nous explique qu’entre Hollande et Aubry, la rupture s’est faite d’un commun accord – en fait, le seul point d’accord, c’est que la guerre est déclarée.
Quant à Laurent Fabius, il fait figure de vieux sage : il était ministre (du Budget) en 1981, quand la gauche est arrivée au pouvoir pour la première fois. Il incarnera le « contrat de génération » cher à François Hollande : un senior au milieu des juniors. On regardera si ça fonctionne.

Jean-Marc Ayrault a dit mercredi que tout ministre battu aux législatives devrait quitter le gouvernement. Est-ce une bonne règle ?

Pourquoi pas. Attention quand-même que ça ne se fasse pas au détriment des femmes – parce qu’à tout prendre, la parité est une règle encore plus légitime. Or on sait bien que, souvent, ce sont elles qui ont les circonscriptions les plus difficiles. Si plusieurs des nouvelles ministres sont battues, Jean-Marc Ayrault regrettera peut-être d’avoir parlé trop vite. C’est peut-être une erreur de… débutant.

Pour écouter le Parti Pris d'Hervé Gattegno ce jeudi 17 mai, cliquez ici.

La Rédaction