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Sabotons la candidature de Lagarde !

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi.

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi. - -

Christine Lagarde a officialisé sa candidature à la direction du FMI pour succéder à DSK. Elle dispose du soutien de tous les pays européens, mais aussi des Américains et des Chinois. Pourtant, j'espère que sa candidature ne sera pas retenue...

Vous trouvez qu'elle n'est pas assez bonne ?

Au contraire ! En fait, elle a trop de qualités pour qu'on la laisse quitter la France. Christine Lagarde n’est pas issue du sérail politique mais elle a réussi à s’imposer à la tête d’un des ministères les plus difficiles. Et comme elle est l’une des rares personnalités françaises considérées à l’étranger, il faudrait qu’elle parte absolument diriger une institution internationale. Je suis sûr qu’elle en a très envie et qu’elle ferait parfaitement l’affaire mais puisqu’on dit beaucoup que l’image de la France s’est dégradée avec l’affaire DSK, Christine Lagarde sera sans doute plus utile pour l’image de la France à Bercy qu’à Washington. Donc je me demande si Nicolas Sarkozy n’aurait pas intérêt à saboter sa candidature.

Oui mais l’Europe veut garder la tête du FMI...

Est-ce vraiment indispensable ? En quoi est-ce profitable à nos intérêts que ce soit un Français qui dirige le FMI ? Il serait aussi légitime d’avoir un ressortissant d’un pays émergeant comme le Brésil, l’Inde ou le Mexique. Il faut bien comprendre que si Christine Lagarde est élue au FMI elle ne sera pas la représentante du gouvernement français. Le fait que Nicolas Sarkozy appuie sa candidature après avoir appuyé celle de DSK n’est pas la preuve qu’ils sont tous sur la même ligne politique mais plutôt qu’il n’y a pas de vrai ligne politique au FMI, en dehors bien sûr de celle de son directeur. En fait le vrai point commun entre Christine Lagarde et DSK, c’est que comme lui, elle parle couramment l’anglais. Et peut être aussi que comme c’était le cas de DSK en 2007, elle s’ennuie un peu dans notre monde politique hexagonal étriqué.

Est-ce qu’elle peut faire campagne en restant à Bercy ?

C’est une vraie difficulté qui je pense est un peu sous-estimée. En 2007, DSK était désœuvré : il avait perdu la primaire au PS et la gauche était dans l’opposition. Donc il n’a eu qu’à passer d’un exil intérieur à un exil extérieur et il a eu tout le temps de faire une campagne autour du monde. Je ne vois pas bien comment Christine Lagarde pourrait en faire autant, ou alors c’est la démonstration qu’on n’a pas besoin d’un ministre de l’économie et des finances à temps plein. Cela me parait peu probable.

Il y a aussi l’affaire Tapie. Est-ce qu’elle ne prend pas un risque inconsidéré en se présentant alors qu’elle est sous la menace d’une enquête de la cour de justice ?

Sur le fond je continue de penser qu’on lui fait dans cette affaire un très mauvais procès et que les griefs avancés contre elle ne tiennent pas. Il n’empêche que si la justice décide d’ouvrir une enquête cela va lui compliquer la tâche dans le contexte des ennuis judiciaires de DSK. Elle a dit hier qu’elle maintiendrait quand même sa candidature s’il y a une enquête mais ce serait en quelque sorte courir avec un boulet au pied. Donc effectivement c’est un risque mais si finalement sa candidature échoue, la France restera l’un des rares pays au monde dont l’économie est dirigée par une femme et cela évitera d’avoir un gouvernement encore plus masculin qu’il ne l’est déjà. Et ça aussi ce serait utile pour corriger notre réputation de pays machiste.

Ecoutez «le parti pris» de ce jeudi 26 mai 2011 avec Hervé Gattegno et Jean-Jacques Bourdin sur RMC :

Hervé Gattegno