RMC

Pour Gérard Longuet, on peut «parler» avec Marine Le Pen

-

- - -

Gérard Longuet voit en Marine Le Pen «un interlocuteur» possible, contrairement à son père. Le ministre de la Défense, issu de l'extrême droite, franchit un pas inédit dans les rangs de l'UMP.

Il est possible de «parler» avec Marine Le Pen, dont l'électorat «patriote» doit voter pour Nicolas Sarkozy au second tour de l'élection présidentielle pour faire obstacle au «socialo-communisme», estime Gérard Longuet.
Dans une interview accordée à l'hebdomadaire d'extrême droite Minute, le ministre de la Défense, lui-même issu de cette mouvance, juge «très respectable» le score de 17,9% des voix réalisé le 22 avril par la présidente du Front national.
«Cela indique une inquiétude des Français face à un monde en mutation», dit-il dans cet entretien à paraître mercredi, alors que Nicolas Sarkozy courtise les électeurs du FN en vue du second tour de la présidentielle.

«Une différence notable entre Marine Le Pen et son père»

«Il y a dans l'électorat de Marine Le Pen une nostalgie d'une France plus classique, plus tranquille, plus établie». Selon Gérard Longuet, la dirigeante du FN n'aurait pas les outrances de son père Jean-Marie Le Pen, plusieurs fois condamné par la justice pour injures à caractère raciste.
«Il y a une différence notable entre Marine Le Pen et son père. Tout le monde sait que je connais bien Jean-Marie Le Pen et il est certain que ce dernier n'a jamais pu résister au plaisir des provocations, dit-il. Sa fille ne souffre pas de ce handicap et nous n'aurons pas, avec elle, de "Durafour crématoire" et autre "'détail" [de l'Histoire, à propos des chambres à gaz, NDLR]. Tant mieux, car il sera désormais possible de parler de sujets difficiles avec un interlocuteur qui n'est pas bienveillant, mais qui, au moins, n'est pas disqualifié», estime le ministre de la Défense, co-fondateur dans les années 60 du groupuscule d'extrême droite Occident.
Selon lui, tous les «patriotes» devraient «faire bloc» contre le candidat socialiste François Hollande en raison de la politique qu'il prône en matière d'immigration.

Réactions à gauche comme à droite

Cette prise de position d'un ténor de l'UMP vis-à-vis du FN constitue une première: jusqu'ici, Nicolas Sarkozy a toujours fait la distinction entre Marine Le Pen et ses électeurs, répétant qu'il n'y aurait pas d'accord avec le Front national.
Le ministre de l'Education Luc Chatel s'est démarqué de son collègue de la Défense, estimant que Marine Le Pen n'est «pas plus un interlocuteur que ne l'était son père (...) Il n'y a jamais eu d'alliances et il n'est pas question de s'allier avec le Front national».
Ce mardi encore, Rachida Dati s'est dite «choquée» par les propos de Gérard Longuet: «Je suis choquée, je n'adhère absolument pas au fait qu'on puisse dire que Mme Le Pen est un interlocuteur (...) De même que je suis pour l'intégration des immigrés venus légalement en France et non pas pour le tri entre "bons" et "mauvais" immigrés», a déclaré l'ex-ministre UMP de la Justice.
De même pour Xavier Bertrand, ministre du Travail, «le prénom a peut-être changé mais le reste n'a pas changé».
A gauche, Pierre Moscovici a jugé «nauséabonds» les propos de Gérard Longuet sur Marine Le Pen, estimant qu'ils «prouvent que les dérives de la droite républicaine entre les deux tours (...) n'ont pas de limites».
Dans un communiqué, Gérard Longuet a tenté de minimiser la teneur de son interview au journal Minute: «Si on peut se réjouir que Marine Le Pen n'ait pas les mauvais calembours de son père, la seule majorité de gouvernement possible est l'alliance du centre et de la droite républicaine».

La Rédaction avec Reuters