Premier accroc sérieux dans la campagne présidentielle

Francois Hollande en visite à Mérignac, en Gironde, mercredi. La campagne pour l'élection présidentielle française a connu son premier accès de fièvre à un peu plus de cent jours du premier tour, à la suite de propos de François Hollande sur Nicolas Sarko - -
par Sophie Louet
PARIS (Reuters) - La campagne pour l'élection présidentielle française a connu son premier accès de fièvre mercredi, à un peu plus de cent jours du premier tour, à la suite de propos de François Hollande sur Nicolas Sarkozy jugés "insultants" par l'UMP, "manipulés" par le PS.
Le candidat socialiste, qui avait prévenu mardi soir sur France 2 qu'il ne se laisserait "pas détourner et impressionner" par le chef de l'Etat, a accusé la majorité d'abaisser le niveau de la campagne en entretenant un climat polémique. "Ça suffit!", a-t-il lancé dans un premier avertissement public à son rival.
Une conversation "off" (des déclarations non officielles destinées à ne pas être publiées) de François Hollande mardi avec des journalistes, rapportée de manière tronquée par Le Parisien-Aujourd'hui en France, a mis le feu aux poudres.
François Hollande, selon la version initiale du journaliste, aurait traité le président sortant de "sale mec".
"Indigne" d'un candidat à la magistrature suprême, ont aussitôt répliqué l'UMP et plusieurs ministres du gouvernement, qui ont demandé des excuses publiques au favori des sondages.
"MANIPULATION GROSSIÈRE"
L'entourage du candidat socialiste a dénoncé "une manipulation grossière" de la majorité, prompte à voir dans cet épisode un "dérapage" aussi dommageable que celui de Lionel Jospin lors de la campagne de 2002.
De retour d'un déplacement à La Réunion, en mars 2002, l'ex-Premier ministre socialiste avait qualifié son adversaire, le président sortant Jacques Chirac, d'homme "vieilli, usé, fatigué" devant des journalistes.
Démentant toute déclaration insultante de la part de François Hollande, plusieurs de ses porte-parole ont renvoyé l'UMP au "Casse-toi pauv'con!" lancé par le chef de l'Etat à un visiteur du Salon de l'agriculture, à Paris, qui avait refusé de lui serrer la main en février 2008.
"Nous n'avons aucune leçon à recevoir de la part d'un parti et d'un président de la République qui a profondément dégradé la fonction présidentielle depuis quelques années en se prêtant sans arrêt à l'insulte", a ainsi déclaré Najat Vallaud-Belkacem sur i-télé.
François Hollande, a-t-elle expliqué, s'est prêté à une imitation de Nicolas Sarkozy "se rendant devant les Français et se reconnaissant cette 'caractéristique' dont l'affublent aujourd'hui beaucoup de Français".
"Franchement, je crois que rares sont ceux des Français qui considèrent que Nicolas Sarkozy est un 'brave type'", a ajouté la porte-parole, au risque de nourrir les attaques de l'UMP.
UNE "TVA SOCIALE" ÉVANESCENTE
Ces dernières n'ont pas tari malgré les mises au point du PS et les précisions du Parisien, à la mi-journée, sur la teneur exacte des propos de François Hollande, relativisés sur la "twittosphère" par d'autres journalistes conviés au déjeuner.
Selon Le Parisien, le candidat socialiste a parodié ainsi Nicolas Sarkozy expliquant le sens d'une candidature à un second mandat : "Je suis un président en échec depuis cinq ans, je suis un sale mec, mais réélisez-moi parce que, dans cette période difficile, je suis le seul capable."
François Hollande, qui entamait en Gironde son marathon présidentiel, s'est efforcé de clore ce premier incident notable de la campagne en disant "stop" aux polémiques.
"Ce que j'ai à dire de Nicolas Sarkozy, je le dis publiquement, directement, avec mes mots, sans intermédiaire, et je le dis devant les Français, a-t-il dit lors d'un point de presse à Pessac. Moi, je ne suis jamais dans l'agression, je laisse ça à d'autres."
Le candidat devait tenir son premier meeting en début de soirée à Mérignac.
"Ce qui est attendu des candidats et des candidates, ce sont des réponses", a dit François Hollande, en critiquant notamment la "TVA sociale", projet évoqué par Nicolas Sarkozy pour alléger le coût du travail et financer la protection sociale.
Le dispositif, présenté comme acquis la veille par Valérie Pécresse, est revenu à l'état d'ébauche mercredi.
Le ministre de l'Economie François Baroin, et la ministre du Budget elle-même, ont déclaré qu'aucun arbitrage n'était pour l'heure rendu et que la "TVA sociale" constituait l'une des pistes à l'étude lors du sommet social du 18 janvier.
Le candidat centriste François Bayrou s'est inquiété d'une "idée dangereuse" qui nécessiterait une hausse de cinq points de TVA insupportable pour les Français.
édité par Patrick Vignal