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Primes au mérite à Suresnes: "Si on me retire de l'argent, je travaillerai moins", assure un fonctionnaire

La Mairie de Suresnes veut être dès 2016, un haut lieu de la méritocratie

La Mairie de Suresnes veut être dès 2016, un haut lieu de la méritocratie - Franek N. flickr- CC

REPORTAGE - Selon un sondage Elabe pour RMC publié ce lundi, 64% des Français sont favorables au développement de primes au mérite et à l'efficacité dans la fonction publique. Un type de rémunération qui existe déjà à Suresnes (Hauts-de-Seine) mais qui n'est pas sans créer des tensions.

Ce lundi, troisième volet de l'opération "Objectif 2017: ce que veulent les Français" sur RMC. L'objectif: dégager des propositions concrètes pour améliorer le quotidien des Français. Et ce mois-ci, le sondage révèle, entre autres, que 64% des personnes interrogées sont pour le développement primes au mérite et à l'efficacité dans la fonction publique. Une rémunération qui existe depuis des années à Suresnes.

Cependant, il y a quelques mois, cette ville des Hauts-de-Seine a réinventé les règles d'attribution du régime indemnitaire, c'est-à-dire les primes et indemnités qui peuvent représenter jusqu’à un tiers des revenus d'un employé municipal. Concrètement, pour la première fois que des fonctionnaires pourront être pénalisés financièrement parce qu’ils ne feraient pas bien leur travail.

"Un vrai facteur de motivation"

Ainsi, le mois prochain, les 1.300 agents de la ville seront payés en fonction de leur entretien d'évaluation passé il y a cinq mois environ. Une prime, un bonus sur leur salaire, qu'ils toucheront tous les mois pendant un an avant de réaliser une autre évaluation. Et toutes les catégories de fonctionnaires sont logées à la même enseigne: tout se décide à l'entretien. Par exemple, un agent de la catégorie A jugé "exceptionnel" pour voir sa prime grimper de /jusqu'à 230 euros par mois. S'il est noté "à améliorer", il perdra d'emblée 100 euros mensuels.

De manière générale, selon Béatrice de Lavalette, adjointe au maire, la mise en place de cette prime a changé le comportement de certains fonctionnaires. "Tout le monde a bien joué le jeu. Cela a été un vrai facteur de motivation et cela a plutôt tiré l'ensemble des agents vers le haut, les encourageant à la performance", se réjouit-elle. Et de rappeler que "l'un des critères de l'évaluation était de prévenir et d'agir sur l'absentéisme", et, selon elle, force est de constater que l'"on a eu effectivement moins d'absents dans les services".

La CGT se sent "trahie"

Dans le détail, sur les 1.125 fonctionnaires, 140 devraient voir leur prime augmenter au mois d'avril de 10 à 35%. A l'inverse, près de 113 agents, dont le travail a été jugé à améliorer ou insuffisant, verront leur prime baisser de 10 à 25%, ce qui peut aller de 20 euros jusqu'à 168 euros. Alors que la mise en place d'une prime au mérite avait reçu l'accord des syndicats, interrogé par RMC, Moustapha Zamoun de la CGT, dit se sentir "trahi" par la municipalité.

"C'est hallucinant ! On veut me faire croire que, depuis qu'on a signé l'accord, d'un seul coup, 10% de fonctionnaires ne font pas leur boulot alors que les années précédentes seulement une quinzaine d'agents voyaient leur prime baisser. Et cette année, il y en a 140 ! Ça je ne peux pas y croire", s'emporte-t-il. Et de menacer: "On va attendre d'avoir les entretiens professionnels pour savoir si c'est justifié ou non. Si ce n'est pas le cas, on dénoncera l'accord et on fera la plus grosse grève jamais vue à Suresnes".

"Un peu sceptique"

Augmentation ou baisse, les fonctionnaires découvriront donc le montant de leur prime dans moins d'un mois. Une attente angoissante pour Christophe des espaces verts: "On est impatients de savoir si on mérite ou pas même si je pense que c'est de la foutaise. En effet, si on ne s'entend pas bien avec la personne qui fait passer les entretiens est-ce qu'elle va dire que l'on mérite? Je suis un peu sceptique". Et de déclarer, en riant: "Si on me retire de l'argent, je travaillerais moins. Ça sera mérité…" A noter qu'il est possible de contester la décision sous forme d'un recours adressé au Maire

Maxime Ricard avec Romain Poisot