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Procès des cols rouges de l'Hôtel de Drouot: "Un vrai système mafieux"

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C'est un procès fleuve qui va débuter ce lundi après-midi au tribunal de correctionnel de Paris. Au total, cinquante personnes, dont les fameux "cols rouges", chargés de la manutention et du transport d'objets destinés aux ventes de l'Hôtel Drouot, sont cités à comparaître pour association de malfaiteurs, vols ou complicité de vols en bande organisée.

On les reconnaissait facilement à leur uniforme distinctif (un col rouge, un blazer noir…). Ils sont au cœur d'un des plus gros scandales du marché de l'art. Eux, ce sont les Savoyards, la corporation chargée de la manutention et du transport des biens destinés à l’hôtel Drouot, haut-lieu parisien des ventes aux enchères. Une quarantaine d’entre eux sont jugés à partir de ce lundi au tribunal correctionnel de Paris pour "association de malfaiteurs" et "vols en réunion". Ils sont accusés d’avoir mis en place un vaste système de d’enlèvement de biens lors inventaires de succession. Explications.

Le scandale éclate en 2009, quand la police reçoit un appel anonyme. Un Savoyard détiendrait une toile de Gustave Courbet volée lors d’une succession. Suite à cet appel, les forces de l'ordre perquisitionnent un entrepôt des Savoyards et découvrent 250 tonnes d’objets volés dont des gravures de Picasso ou Chagall, la salopette du mime Marceau, des grandes bouteilles de vin… Concrètement, pendant des années, les Savoyards se sont allègrement servis lors des inventaires de succession, revendant même souvent leur butin aux enchères de l’hôtel Drouot.

"Cela a duré pendant des années"

Leurs cibles de choix? Les vols de personnes âgées décédées seules et dont les héritiers ignoraient tout du patrimoine. La pratique assurait aux Savoyards un train de vie plus que confortable: certains s’achetaient des restaurants, d’autres roulaient en voiture de luxe…Et les remords ne semblent pas les étouffer “Les gens qu’on a volé étaient morts, ils ne se sont aperçu de rien” avait ainsi déclaré un Savoyard aux enquêteurs.

Les Savoyards jugés à partir de lundi ont tous reconnu les faits. Selon l’accusation, l’ensemble de la corporation des Savoyards participait à ce système de pillage régulier et organisé comme l'explique à RMC Maître Bernard Cahen, l’avocat de plusieurs des parties civiles. "C'est un vrai système mafieux qui a été mis sur pied, assure-t-il. Cela a duré pendant des années et beaucoup de personnes au courant ont caché, ou cherché à cacher la réalité de ce qu'il se passait derrière les ventes de Drouot".

"L'hôtel des ventes ne savait rien"

Et d'ajouter: "Les victimes attendent la restitution de leurs biens ou des dommages et intérêts et espèrent évidemment la condamnation des coupables". Plusieurs commissaires-priseurs sont également jugés. Ils sont accusés d’avoir fermé les yeux et accepté de vendre les objets volés aux enchères. Les Savoyards assurent que les commissionnaires-priseurs étaient au courant des vols et qu’ils leurs mettaient même des biens de côté lors des inventaires de succession. Une accusation absurde, répond l’avocat de l’hôtel Drouot, Karim Beylouni.

"L'hôtel des ventes a pour activité les ventes aux enchères. Celles-ci sont opérées par des commissaires-priseurs dont l'objectif est d'avoir les plus belles ventes possibles, les plus prestigieuses. C'est ce qui assoit sa notoriété donc il n'a aucun intérêt à ce qu'on lui vole un Courbet qu'il est chargé de vendre", argumente-t-il. Et de marteler: "L'hôtel des ventes ne savait rien et ne pouvait pas savoir".

M.R avec Marie Dhumieres