RSA, ASS, AAH, ATS... Le gouvernement s'attaque à la jungle des minimas sociaux

C'est la CAF, Caisse d’allocations familiales, qui gère les minimas sociaux. (Photo d'illustration). - Philippe Huguen - AFP
RSA, ASS, AAH, ATS... C'est à n'y rien comprendre. Conscient que les minimas sociaux sont trop complexes et peu équitables, le gouvernement s'attaque enfin à leur réforme. Un vaste groupe de travail, composé d'associations, de collectivités, d'administrations de l'État et d'opérateurs, et présidé par le député PS Christophe Sirugue, se réunit pour la première fois ce mercredi pour mettre y de l'ordre. D’ici fin mars, le groupe de travail devra proposer des mesures pour simplifier et harmoniser ces minimas sociaux. Parmi les neuf minima sociaux figurent le RSA "socle" (revenu minimum pour personnes sans ressources), l'Allocation de solidarité spécifique (ASS) pour chômeurs en fin de droits, ou encore les allocations veuvage, adulte handicapé (AAH) et le minimum vieillesse.
"On n'y comprend pas grand-chose"
Pour se rendre compte de la jungle des minimas, RMC s'est rendue dans une association des quartiers nord de Marseille qui aide les allocataires dans leurs démarches. Un véritable sacerdoce pour Fathia Ziani, de l’association CLCV de la cité Frais-Vallon. Nous l'interrompons en pleine discussion avec une habitante. "L'allocation spécifique est de 400 euros, mais vu que tu es au RSA, il vaut mieux que tu t'inscrives à l'allocation logement, c'est plus intéressant…". Ou l'art de jongler entre toutes les aides pour ne pas perdre d'argent.
Fathia Ziani le reconnaît : "On n'y comprend pas grand-chose". Comment conseiller au mieux une personne quand les prestations sociales s'apparentent à un maquis remplis de pièges ? "Si je l'aide à monter un dossier adulte handicapé et qu'elle perd son RSA ou ses autres prestations liées au RSA, elle va venir me dire : 'Là j'ai gagné 300 euros, mais j'ai perdu 400 euros par ailleurs'. On est vraiment mis en porte-à-faux", déplore-t-elle.
"La simplification ? On va encore leur couper plus de droits"
Selon la Cour des comptes, 4,21 millions de personnes percevaient des minimas sociaux en 2013 (+17,6% depuis 2008, dont +35% pour le RSA) et leur montant a progressé de 30% entre 2008 et 2014, à 24,8 milliards d'euros. Et pourtant, de nombreux allocataires passent à côté des aides auxquelles ils ont droit, par méconnaissance, ou par peur de perdre des prestations par ailleurs. C’est ce qu’on appelle le "non recours". En cause notamment, selon Saliha, la difficulté d’obtenir des informations quand on est, comme elle, simple allocataire. "On avait un point Caf (Caisse d'allocations familiales, NDR) qui a fermé. Maintenant on demande aux personnes d'appeler la Caf, qui nous informe qu'un conseiller technique va nous rappeler. Au bout du compte on ne nous rappelle pas, on n'ose pas rappeler, et voilà. Et puis c'est un numéro payant… et cher en plus".
Paradoxalement, Fathia Ziani craint que l'harmonisation et la simplification des minimas sociaux que prépare le gouvernement se fasse au détriment des allocataires. "Ce qui me fait peur, c'est que sous couvert d'harmonisation et de simplification on va encore leur couper plus de droits. La simplification, je m'en méfie et les familles aussi, elles vont encore se faire avoir". C'est pourquoi les associations défendent plutôt l’idée d’une automatisation des versements des minimas sociaux.
Trois scénarios de réforme
Le député Christophe Sirugue prévoit de proposer d'ici fin mars trois scénarios de réforme: une refonte complète, qui impliquerait une réorganisation autour d'un minimum social de base (sorte de revenu minimum d'existence), auquel s'ajouteraient deux allocations: l'une pour les personnes ne pouvant reprendre une activité (handicap lourd, personnes âgées), l'autre pour celles pouvant espérer se réinsérer. Un autre scénario consisterait à ajuster quelques minima sociaux, et le troisième en un simple rapprochement entre ASS et RSA.