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Rupture et averses pour les premiers pas de François Hollande

Entre averses, coup de foudre, bains de foule et hommages très politiques, François Hollande a effectué mardi ses premiers pas de septième président de la Ve République sous le signe de la rupture avec son prédécesseur Nicolas Sarkozy. /Photo prise le 15

Entre averses, coup de foudre, bains de foule et hommages très politiques, François Hollande a effectué mardi ses premiers pas de septième président de la Ve République sous le signe de la rupture avec son prédécesseur Nicolas Sarkozy. /Photo prise le 15 - -

par Yann Le Guernigou et Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Entre averses, coup de foudre, bains de foule et hommages très politiques, François...

par Yann Le Guernigou et Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Entre averses, coup de foudre, bains de foule et hommages très politiques, François Hollande a effectué mardi ses premiers pas de septième président de la Ve République sous le signe de la rupture avec son prédécesseur Nicolas Sarkozy.

C'est le costume trempé et les lunettes embuées que le nouveau chef de l'Etat est arrivé à midi à l'Arc de triomphe pour ranimer la flamme sur la tombe du soldat inconnu après une remontée des Champs-Elysées sous une pluie battante, debout dans une DS5 décapotable, saluant stoïquement de la main le public clairsemé qui avait bravé les averses.

"Je ne crains rien", a-t-il répondu à une journaliste qui lui demandait à son retour à l'Elysée s'il n'était pas gêné par la pluie qui a transformé sa veste en éponge.

Les intempéries lui ont joué un dernier mauvais tour en fin d'après-midi lorsque l'avion qui devait l'emmener vers Berlin a dû rebrousser chemin après avoir été frappé par la foudre. Le nouveau président a dû prendre un autre appareil pour honorer - avec retard - son premier rendez-vous avec Angela Merkel.

Il avait auparavant pris ses fonctions lors d'une cérémonie solennelle qui a réuni environ 400 personnes à l'Elysée.

Arrivé à la présidence à 10h00, il y est accueilli par Nicolas Sarkozy avec qui il s'entretient pendant 35 minutes, le temps d'évoquer les dossiers délicats en suspens, voire le reclassement de certains collaborateurs du président sortant.

Le nouveau président raccompagne ensuite l'ancien jusqu'au perron de l'Elysée, en compagnie de leur compagne et épouse respectives, Valérie Trierweiler et Carla Bruni-Sarkozy, pour regagner l'intérieur avant même que l'ex-couple présidentiel ait quitté la cour, ce qui a suscité quelques commentaires.

Dehors, quelques centaines de ses partisans rameutés par l'UMP pour manifester une dernière fois leur soutien à leur champion scandent "Merci Nicolas ! Merci Sarkozy !" en agitant des drapeaux tricolores.

Après la traditionnelle présentation du collier de grand maître de l'ordre national de la Légion d'honneur, François Hollande prononce son premier discours, marqué par une forte volonté de rupture avec son prédécesseur.

ROCARD EN RETARD

Il avait invité pour l'occasion les anciens Premiers ministres socialistes mais aussi des prix Nobel français. Des membres de son comité de soutien, comme l'homme d'affaires Pierre Bergé et le metteur en scène Jean-Michel Ribes, sont dans le public.

Après avoir salué les premiers rangs, composés aussi de représentants des corps constitués et des cultes, François Hollande se retire dans le salon des portraits pour son premier déjeuner de président.

Pressé de langoustines aux agrumes, suivi d'une côte de boeuf grillée vigneronne accompagnée de carottes nouvelles au jus, fromages, puis macarons fraise avec glace au mascarpone sont au menu.

Outre le chef de l'Etat et sa compagne, le tour de table réunit Pierre Mauroy, Lionel Jospin et son épouse, Laurent Fabius et Edith Cresson, tous anciens chefs de gouvernement socialistes, ainsi qu'Yvette Roudy, ex-ministre de François Mitterrand, et le président PS du Sénat Jean-Pierre Bel.

Seul manque à l'appel Michel Rocard, qui n'arrive qu'au café. «Il revient d'une destination lointaine sur laquelle je ne tiens pas à m'étendre», explique un proche de François Hollande, en faisant allusion à la visite controversée de l'ex-Premier ministre en Iran.

En début d'après-midi, les appariteurs décrochent dans les bureaux le portrait officiel de Nicolas Sarkozy.

Pendant ce temps, François Hollande se livre à un bain de foule impromptu devant l'Elysée, où ses partisans ont pris le relais de ceux de Nicolas Sarkozy, avant de se rendre aux Tuileries pour un hommage suivi d'un discours à Jules Ferry, le père de l'école laïque, gratuite et obligatoire.

RÉPONSE AU DISCOURS DE LATRAN

Conscient des polémiques suscitées par son choix, il n'oublie pas de mentionner les "égarements politiques" de ce grand homme de la IIIe République qui a aussi été un chantre de la colonisation.

Mais c'est surtout au nom de la priorité qu'il entend accorder à l'Education nationale qu'il a entrepris cet hommage, là aussi au nom d'une rupture assumée avec son prédécesseur.

Comme pour enfoncer le clou, il réplique au discours de Latran prononcé fin 2007 dans lequel Nicolas Sarkozy affirmait que "l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur dans la transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal", en déclarant :

"Si le savoir n'est pas le monopole du maître, celui-ci, le maître, le professeur, l'enseignant doit garder la responsabilité d'en ordonner le sens."

La pluie reprend de plus belle quand François Hollande arrive à l'institut Curie après avoir traversé la Seine pour déposer une gerbe au pied de la statue de Marie Curie, cette scientifique d'origine polonaise consacrée par des prix Nobel de physique et de chimie.

Il achève son après-midi parisien par une visite à l'Hôtel de Ville, où il est longuement ovationné par une assistance où se bousculent notamment tous les responsables du PS.

Avec plus d'une demi-heure de retard sur l'horaire prévu, il prend vers 16h30 le chemin de l'aéroport de Villacoublay (Yvelines), d'où il s'envole pour Berlin pour un entretien suivi d'un dîner de travail avec la chancelière Angela Merkel. La foudre provoquera un nouveau retard de plus d'une heure.

Le cortège présidentiel est encore dans les rues de la capitale quand Pierre-René Lemas, dont la nomination comme secrétaire général de l'Elysée est intervenue une heure plus tôt, annonce que le président a chargé Jean-Marc Ayrault de former son premier gouvernement.

avec Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse

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