Sarkozy sous la menace des juges après son départ de l'Elysée

Après son départ de l'Elysée, Nicolas Sarkozy risque des ennuis judiciaires dans plusieurs dossiers visant de supposées malversations financières. /Photo prise le 7 mai 2012/REUTERS/Yves Herman - -
Affaires Bettencourt, Karachi ou Kadhafi : après son départ de l'Elysée, Nicolas Sarkozy risque des ennuis judiciaires dans plusieurs dossiers visant de supposées malversations financières.
Le président sortant, qui a bénéficié durant cinq ans d'une immunité pénale liée à son statut, redeviendra un justiciable ordinaire un mois après la fin de ses fonctions, soit le 15 juin, stipule la Constitution.
AFFAIRE BETTENCOURT
L'ex-gestionnaire de fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, mis en examen et écroué depuis le 23 mars, doit être interrogé à nouveau jeudi prochain par le juge d'instruction bordelais Jean-Michel Gentil, a-t-on appris auprès de ses avocats.
Le juge a découvert des retraits d'espèces sur les 12 comptes suisses détenus par les Bettencourt pour quatre millions d'euros entre 2007 et 2009, dont deux de 400.000 euros chacun au premier semestre de 2007.
Alors que, selon une expertise, Liliane Bettencourt était en état de démence depuis au moins 2006, Patrice de Maistre admet avoir reçu l'argent dans son bureau. Il dit avoir remis ensuite l'argent aux Bettencourt - André Bettencourt est mort fin 2007 - et assure ignorer ce qu'ils en ont fait.
Le juge Jean-Michel Gentil et deux autres magistrats ont saisi les comptes de campagne 2007 de Nicolas Sarkozy, ainsi que des agendas des Bettencourt montrant que le candidat d'alors de l'UMP semble leur avoir rendu visite fin février 2007.
Les juges remarquent que le premier retrait de 400.000 euros, le 5 février 2007, précède par ailleurs de deux jours une rencontre entre Patrice de Maistre et Eric Woerth, alors trésorier de l'UMP et de la campagne Sarkozy.
Par ailleurs, dans un carnet saisi par la police, le photographe François-Marie Banier, qui a bénéficié des largesses de Liliane Bettencourt en tant que confident, rapporte à la date du 26 avril, qui correspond à l'autre retrait de 400.000 euros, une phrase de la milliardaire: "De Maistre m'a dit que Sarkozy avait encore demandé de l'argent. J'ai dit oui".
Les juges sont donc susceptibles de demander l'audition de Nicolas Sarkozy, voire une mise en examen.
AFFAIRE KARACHI
Dans l'affaire Karachi, l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine a été à nouveau interrogé mercredi par le juge Renaud Van Ruymbeke .
Si le nom de Nicolas Sarkozy apparaît bien dans le dossier d'enquête, c'est en qualité de ministre du Budget (1993-1995), fonction dans laquelle il aurait, selon un rapport de la police luxembourgeoise, approuvé la création de structures off-shore au Grand-Duché, supposées avoir servi à des malversations.
L'hypothèse des juges est que ces structures ont servi au détournement partiel, à des fins de financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, de commissions légales convenues en marge de la vente de sous-marins au Pakistan (84 millions d'euros) et de frégates à l'Arabie saoudite (200 millions d'euros) dans les années 1990.
Un lien est soupçonné entre l'imbroglio sur les paiements de commissions au Pakistan et un attentat à Karachi qui a tué onze Français travaillant sur les sous-marins, en 2002.
Une audition comme témoin de Nicolas Sarkozy, porte-parole de la campagne Balladur est possible, mais des poursuites relèveraient de la Cour de justice de la République (CJR), seule institution compétente pour les actes ministériels. François Hollande a promis toutefois de supprimer la CJR et de déférer les ministres devant les juridictions ordinaires.
KADHAFI
Le parquet de Paris a ouvert fin avril une enquête préliminaire de police contre le site d'information Mediapart, sur plainte de Nicolas Sarkozy, après des accusations de financement illégal de la campagne de 2007 par le régime de Mouammar Kadhafi en Libye.
La procédure pour "faux et diffusion de fausses nouvelles" va amener la police à s'intéresser à la véracité éventuelle du document publié par Mediapart, portant ce qui est présenté comme la signature du patron des services secrets libyens de l'époque, Moussa Koussa.
Le site l'a présenté comme une note des autorités libyennes formalisant un accord pour un appui à la campagne de Nicolas Sarkozy de 2007 pour un montant de cinquante millions d'euros. La confusion règne sur ce document, Moussa Koussa en niant l'authenticité tandis que des avis contradictoires étaient émis par plusieurs ex-dignitaires du régime Kadhafi.