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Sarkozy tente de gommer son image de "président des riches"

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par Yann Le Guernigou PARIS (Reuters) - Des mesures pour augmenter le pouvoir d'achat des bas salaires, une attaque contre ceux des grands patrons,...

par Yann Le Guernigou

PARIS (Reuters) - Des mesures pour augmenter le pouvoir d'achat des bas salaires, une attaque contre ceux des grands patrons, le tout accompagné de regrets sur la soirée de 2007 au Fouquet's : Nicolas Sarkozy a entamé un exercice de crédibilité qui passe par une tentative d'effacement de son image de "président des riches".

La tâche ne s'annonce pas facile et l'analyste Brice Teinturier parle même d'un "handicap lourd à combler" pour le président-candidat à deux mois du premier tour de la présidentielle.

Mercredi soir sur France 2, le président-candidat a proposé coup sur coup une suppression des charges sur les salaires compris entre 1 et 1,2 fois le smic qui serait financée par l'argent de la prime pour l'emploi (PPE) et une hausse de la fiscalité sur les dividendes.

Il a cité un gain net d'"un peu moins de 1.000 euros" pour les sept millions de bénéficiaires, mais dans les faits de l'ordre de 570 euros en moyenne, et même de moins de 70 euros pour ceux qui touchaient la PPE.

Nicolas Sarkozy s'est prononcé aussi pour que les rémunérations des grands patrons soient approuvés en assemblée générale des actionnaires et que leurs autres avantages du type retraite-chapeau ou "parachute doré" soient interdits.

Pour Brice Teinturier, de l'institut Ipsos, le président sortant essaye "de retrouver ce qui avait été une composante de l'alchimie gagnante de 2007, l'idée de celui qui est proche du peuple, avec la volonté de cibler les Français qui travaillent et qui ont des fins de mois difficiles".

Sans se prononcer sur son efficacité, il relève qu'il s'agit de la première mesure concrète avancée par Nicolas Sarkozy dans sa campagne "qui touche à une préoccupation très importante des Français, le pouvoir d'achat".

"JUSTICE ET ÉQUITÉ"

Pour Jérôme Sainte-Marie, de CSA, il s'agit pour lui de "montrer qu'il n'est pas indifférent à la souffrance sociale". "En visant les catégories des petits salaires, la droite pense qu'elle peut les séduire en jouant contre les supposés assistés et les élites culturelles", dit-il.

Les regrets exprimés pour la soirée du Fouquet's, un des symboles d'un début de quinquennat "bling-bling" que ses adversaires ont exploité pendant cinq ans, ont complété l'exercice télévisé.

"Tout est très cohérent", souligne Guillaume Peltier, un des membres de l'équipe de campagne de Nicolas Sarkozy.

"Il dit qu'il est le candidat du peuple, il tend la main aux Francais par le référendum, il tend la main aux formations politiques par la proportionnelle et il tend la main aux salariés via le pouvoir d'achat. Il met la justice et l'équité au coeur de son projet."

Quant aux regrets sur le Fouquet's, "il ne s'agit pas d'un exercice de repentance, il n'y a rien de religieux, mais de pédagogie et d'explication : il a dit que tout n'avait pas été réussi et que s'il y avait des choses à refaire, il ne le referait pas comme ça", a-t-il ajouté.

Mais le problème de Nicolas Sarkozy est que, pour que sa campagne et ses propositions fonctionnent, "il faut que l'émetteur puisse être cru. Or aujourd'hui, il ne l'est pas", souligne Gaël Sliman, de l'institut BVA.

LE CANDIDAT PLOMBÉ PAR LE PRÉSIDENT

Un sondage comparatif BVA-Orange pour la presse régionale publié mardi montre ainsi que le chef de l'Etat sortant est vu par 81% des Français comme le "président qui protège les élites et le système", contre 12% pour François Hollande, et par seulement 16% comme le plus proche du peuple (77% pour le candidat socialiste).

"Il se rend compte que toutes les bonnes idées qu'il pourrait avoir comme candidat sont plombées par le président. Pour tenter de l'éviter, il essaye de purger ça en déclarant qu'il a changé, qu'il regrette" certains événements, indique Gaël Sliman.

L'exercice devrait trouver un prolongement dans un livre qui sera prochainement publié.

Brice Teinturier juge que Nicolas Sarkozy pourra au mieux "atténuer" cette image négative.

Pour y remédier, Jérôme Sainte-Marie souligne qu'il lui faudra échapper au maximum à sa position de sortant en créant le débat sur ses propres propositions de façon à ce qu'il n'y ait pas de long débat sur son bilan.

Dans un livre récent ("Le Pompier ou le Maçon ?"), Gaël Sliman estimait pour sa part que seul un "événement exogène majeur" comme une aggravation brutale de la crise grecque permettrait à Nicolas Sarkozy de refaire son retard sur François Hollande.

"Nicolas Sarkozy a été crédité d'un bon bilan dans la gestion à chaud des crises. S'il ne se passe rien d'extraordinaire et que le match se résume à savoir à qui on a le plus confiance pour gérer le pays, ce sera compliqué pour lui. S'il se passe des choses lourdes, graves, anxiogènes pour les Francais, le match sera beaucoup plus équilibré ", prédit-il.

édité par Patrick Vignal

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