Météo-France: pourquoi les prévisionnistes sont en grève

Alors que la tempête Louis cause de gros dégâts, notamment dans le nord de la France, les agents de Météo-France sont en grève. Ils alertent sur une dégradation de la qualité des prévisions ces prochains jours, comme cette nuit car il n'y avait pas de prévisionniste de service disponible pour briefer les médias, comme c’est le cas habituellement.
Une grève jusqu'à début mars
Un nouveau préavis de grève a été déposé, jusqu’à début mars. Il y en avait déjà eu un mouvement en novembre, et un autre en décembre. Les syndicats, la CGT et FO notamment, dénoncent dans leurs communiqués le fonctionnement de Météo-France "en mode dégradé", disent-ils, ce qui entraine une détérioration très nette des prévisions diffusées, notamment sur le site internet ou l’application.
Par exemple, il est devenu courant, affirme la CGT, que les pictogrammes que nous voyons sur les prévisions météo soient totalement erronés: de la neige non prévue, du soleil par temps couvert ou des anomalies dans les températures. Le 9 décembre, Strasbourg affichait 28 degrés, loin évidemment de la réalité.
Tout un programme d’automatisation des prévisions est remis en cause par les syndicats. Surnommé "3 P", pour "programme-prévision-production", il était en rodage depuis septembre et a été lancé pour de bon, le 13 novembre. Pour les syndicats, c’est "à marche forcée" et au final, "la catastrophe est pire qu’imaginée", disent-ils.
En fait, Météo-France a mis en place deux systèmes de prévisions: l’un pour les gros clients qui payent, les médias par exemple, qui reçoivent toujours le travail des prévisionnistes, des humains et un autre canal pour le grand public: c’est ce qu’on peut voir en se connectant sur le site, ou en ouvrant l’application. Là ce sont des prévisions automatisées.
Une météo à deux vitesse. Ce qui change tout, c’est que jusque-là, ces prévisions étaient validées dans chaque région par un prévisionniste. Désormais, il n’y a qu’une seule personne pour toute la France, basée à Toulouse, qui est en charge de vérifier que la machine ne fait pas d’erreur. Évidemment, cela paraît mission impossible.
Un mal-être chez les employés
Tout cela provoque un malaise profond chez les prévisionnistes qui ont le sentiment de ne plus pouvoir faire correctement leur travail.
L’entreprise reconnaît qu’il y a pu avoir des bugs depuis la mise en place de ce nouveau programme d’automatisation mais assure qu’ils ont été corrigés et réfute l’idée d’une dégradation globale des prévisions.
Dans un tweet, Météo-France affirme "continuer à améliorer les outils", promet de poursuivre l’accompagnement des agents et insiste sur le fait que "l’expertise des 600 prévisionnistes conserve une place majeure". Les vigilances notamment, restent décidées par des experts humains.
Ce qui est un fait, c’est que ces prévisionnistes sont de moins en moins nombreuses. Météo-France a beaucoup réduit ses effectifs ces dernières années. Un tiers des postes, soit 1.200, ont été supprimés en 15 ans.
Plusieurs salariés qui s’expriment anonymement dans le journal Sud-Ouest témoignent d’une forme de mal-être qui s’est installé face à ce qu’ils voient comme une météo devenue bas de gamme. Ils reçoivent des réclamations et vivent mal les quolibets sur les réseaux sociaux.
Certains affirment avoir "honte de dire qu’ils travaillent pour Météo-France". Un prévisionniste avoue qu’il recommande désormais à son entourage "de ne pas se fier au site de Météo-France".