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Le risque de collision d'astéroïde avec la terre est réel, mais sa probabilité limitée

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L'astéroïde 2012 TC4, qui a la taille d'une grosse maison, passera jeudi tout près de la Terre, sans représenter de danger pour celle-ci. Si de tels astéroïdes frôlent régulièrement notre planète, la probabilité pour qu'ils causent des dommages irréversibles est limitée, et peut même être évitée selon le Dr Patrick Michel, spécialiste des astéroïdes joint par RMC.fr.

Le Dr Patrick Michel est directeur de recherche au CNRS et spécialiste des astéroïdes.

"On a une population d'astéroïdes, qu'on appelle géocroiseurs, qui croisent la trajectoire de la terre. Dans cette population, nous avons répertorié 1.000 corps de plus d'un kilomètre. Cette taille correspond au seuil de catastrophe globale: si un objet d'1km tombe sur la terre cela provoque des dégâts à l'échelle du globe. Un tel scénario se produit tous les 500.000 à 1 million d'années.

Par contre, plus les objets sont petits et plus ils sont nombreux. Le 2012 TC4 qui passe ce jeudi près de la terre fait entre 10 et 30 mètres de diamètre. De tels objets de 30 mètres, on en connaît 15.000 et on estime leur nombre à 1 million au total.

"En 2029, un astéroïde de 350 mètres passera près de la terre"

Chacun a sa propre trajectoire qui est soumise aux perturbations des planètes, qui les modifient. Et certains d'entre eux, effectivement, passent près de la terre. La lune se trouve à 380.000 km de la Terre, et là, 2012 TC4 va passer à environ 50.000 km de notre planète, un peu au-dessus de l'orbite des satellites géostationnaires. Mais il est tout petit.

En 2029, nous aurons un objet qui s'appelle Apophis, qui fait 350 mètres de diamètre et qui passera à moins de 36.000 km de la terre. Il sera même visible à l'œil nu. S'il tombait sur Terre, il ferait des dégâts à l'échelle d'un continent.

Mais les fréquences d'impact sur Terre restent heureusement relativement faibles: les objets de 10 à 30m, c'est tous les siècles. L'un d'entre eux est tombé près de la ville de Tcheliabinsk, en Russie, en février 2015. Il a fait beaucoup de dégâts, avec des vitres brisées, et 1.000 blessés. Mais c'est la première fois que cela arrivait sur une zone habitée. Un objet de 100m, c'est tous les 15.000 ans ; un objet de 300 m qui tombe sur la terre, c'est à peu près tous les 60.000 ans... On parle à l'échelle de siècles ou de dizaines de milliers d'années.

"Le risque naturel le plus faible"

Puisque la terre est recouverte aux deux tiers d'eau, la probabilité qu'un événement se produise sur une zone habitée est quand même très faible. Le risque d'impact d'astéroïde est d'ailleurs le risque naturel le moins probable par rapport aux tsunamis, aux ouragans, aux tremblements de terre… C'est aussi et surtout le seul qui peut être prédit et évité. Pour prédire, il faut déjà faire l'inventaire: d'ici 20 ans notre inventaire sera encore plus complet. Et pour l'éviter, il faut au moins valider une technique de déviation d'astéroïde. Justement, avec l'Agence spatiale européenne (ESA) et la Nasa, nous travaillons sur un projet (appelé Aïda) qui consiste à faire un test de déviation d'un petit astéroïde. En projetant sur lui un satellite de 500 kilos à la vitesse de 7km par seconde, on pourrait dévier sa trajectoire. Nous travaillons pour effectuer un test en 2022.

Le risque de collision de la Terre est réel, ce n'est pas un fantasme, mais avec un inventaire complet et une méthode pour faire dériver les astéroïdes, on réduit drastiquement le risque. Si on connaît les astéroïdes et leur temps de passage vers la Terre grâce à notre inventaire, et qu'on a une technique validée de dérivation, on sera moins préoccupés. C'est un risque qu'on peut, non pas maîtriser parce que ce serait un peu optimiste, mais qu'on peut drastiquement diminuer."

Propos recueillis par Philippe Gril