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Retour de Thomas Pesquet sur Terre: les missions humaines dans l'espace servent-elles encore à quelque chose?

EXPLIQUEZ-NOUS -  Le retour sur Terre de Thomas Pesquet est (finalement) prévu dans la nuit de lundi à mardi. L'astronaute français sera resté plus de six mois à bord de l’ISS, la station spatiale internationale.

Il est de retour! Après six mois dans l'espace, le Français Thomas Pesquet revient. Cette mission Alpha aura fait de Thomas Pesquet le Français qui sera resté le plus longtemps dans l’espace. Plus d’un an en deux voyages de plus de six mois. 

Il est aussi le premier Français à être commandant de bord de la station spatiale, le premier à avoir réalisé cinq sorties dans l’espace... L'homme qui va rentrer demain est le spationaute français le plus capé et il le restera longtemps.

Sa mission a aussi confirmé ses talents de communicant: il a fait des interventions en direct de l’espace retransmises dans plus de 4.000 écoles, collèges et lycées. 100.000 jeunes ont pu dialoguer avec lui.

Il a alerté sur l’état de la planète vue du ciel, les incendies spectaculaires, les tornades et les ouragans. Il a fait des dizaines de milliers de photos et les a partagées sur ses réseaux sociaux.

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Il a aussi fait de multiples expériences

Une centaine en tout, dont une sur le sommeil, menée avec le CHU de Toulouse. Il a, par exemple, testé un simple bandeau que l’on met autour de la tête et qui enregistre l’activité du cerveau pendant la nuit. Il s’agissait de valider que ce bandeau fonctionne bien. C’est le cas.

Et il s’agissait d’étudier la qualité du sommeil, parce qu’il est perturbé par les multiples levers et couchers du soleil (16 fois par jour). L’idée est de bien comprendre comment dorment les spationautes: essentiel pour d'éventuels voyages habités vers Mars... qui dureront 9 ou 10 mois pour l’aller et autant pour le retour. Il vaudra mieux ne pas être insomniaque.

Thomas Pesquet a aussi participé à une expérience assez amusante sur la lévitation acoustique. Déplacer des objets sans les toucher. Non pas avec les forces de l'esprit façon Star Wars mais avec la puissance du son.

Avec un truc qui ressemble un peu a un sèche-cheveux, on crée un faisceau d’ultrasons qui piège une petite bille bleue et la fait bouger. Comme une pince sans contact. Ça pourrait être très utile pour recueillir des échantillons sans les contaminer.

Mais est-ce que l’on peut mesurer la valeur scientifique de ces expériences?

Sur les expériences de Thomas Pesquet lors de cette mission, il est trop tôt pour le dire, mais la question se pose pour l’ensemble des recherches faites dans l’espace depuis 50 ans. Qu'a-t-on découvert grâce aux vols habités depuis le début de la conquête spatiale? Certains n'hésitent pas à répondre: rien! Ou presque rien.

Claude Allègre, ancien ministre de l’Education et de la recherche, a été un des premiers à mettre les pieds dans le plat dans les années 2000. Il a fait remarquer qu’aucun résultat scientifique majeur n’a été obtenu grâce aux expériences menées lors des vols habités. La recherche spatiale, selon lui, ne peut se vanter que de quelques expériences intéressantes sur la réaction du corps humain en apesanteur. Mais le rapport entre le coût et les progrès est totalement disproportionné.

Plus récemment, un spécialiste suisse, Pierre Brisson, a fait le même constat. Il estime que depuis 50 ans quasiment rien n’a été accompli grâce aux vols habités. Rien si ce n’est faire tourner des hommes autour de la terre.

Le prochain grand projet international est la plateforme Gateway. Il s'agit d'une station spatiale qui tournera en orbite non pas autour de la terre mais autour de la lune. Quand on demande au Suisse Pierre Brisson l'intérêt d'une telle mission, il répond: aucun, si ce n’est de faire travailler des fournisseurs de faire vivre l’industrie de l’espace.

La conquête de l’espace ne servirait plus à rien?

La conquête de l’espace est une aventure formidable qui a permis des progrès extraordinaires. Pour mieux connaître notre Terre, et pour mieux connaître l’univers.

Ce qui est en cause aujourd’hui c’est la présence de l’homme dans l’espace qui n’apporte plus grand chose. Alors que 550 personnes ont participé à ces vols habités depuis Youri Gagarine en 1961. L’arrivée des privés comme Elon Musk et la perspective de la conquête de Mars vont sans doute changer la donne dans les prochaines années. 

Nicolas Poincaré (édité par J.A.)