Semaine de l'infertilité: "Ça devient insupportable de voir les autres avec des enfants"

Un couple sur six est touché par l'infertilité en France. - Joseph Lago - AFP
C'est un phénomène encore tabou, dont on ne parle pas, comme si faire des enfants était un acte simple et évident. Alors qu'un couple sur six est touché par l'infertilité en France, ceux qui en souffrent ont du mal à en parler. Sentiments de honte, de culpabilité, qui peuvent entraîner un repli sur soi. Alors une association a décidé de la semaine de l'infertilité pour sensibiliser le grand public. C'est une première en France.
Médicalement, on parle d'infertilité quand un couple en âge de procréer n'arrive pas à avoir un enfant au bout d'un an. Toute cette semaine, pendant cinq jours, des conférences et des débats vont réunir médecins, patients et associatifs, à Caen (Calvados), pour libérer la parole.
"La société n'est pas bienveillante"
C'est l'association Bamp ("B" pour blog, "AMP" pour assistance à la procréation), composée de patients qui ont eu recours à la PMA, qui est à l'origine de cette semaine de sensibilisation. Virgine Rio, sa cofondatrice, espère changer les mentalités autour de l'infertilité. "Quand certaines personnes parlent d'infertilité à leur entourage ou à leurs amis, on leur adresse des propos très agressifs, comme 'c'est pas grave', ou 'ton homme arrive pas à te faire d'enfant et bien viens me voir je vais t'en faire un'... Des phrases toutes faites que les gens balancent comme ça sans se rendre compte de l'impact que cela peut avoir quand on est en désir d'enfant", déplore-t-elle. Selon elle, "la société n'est pas bienveillante avec les gens qui n'arrivent pas à faire les choses comme tout le monde".
"Pourquoi ça m'arrive à moi et pas aux autres?"
RMC a rencontré Charlotte, 45 ans. Quand elle était petite fille, elle se voyait déjà derrière une poussette: "Je m'imaginais que j'allais rencontrer mon prince charmant, que j'allais avoir une belle famille et que tout allait être très simple". Au lieu de ça, tout a été très compliqué. Pendant 10 ans, Charlotte a tout essayé pour tomber enceinte, en vain. "On se demande tout le temps pourquoi ça m'arrive à moi et pas aux autres ? Qu'est-ce qui ne tourne pas rond, alors que les médecins me disent que je n'ai pas de problème physiologique ? Il y a un moment où ça devient insupportable de voir les autres avec des enfants. Donc effectivement ça amène une forme d'isolement et une forme de solitude", raconte-t-elle.
Épuisée, à bout, Charlotte demande alors de l'aide: "Il y a un moment où on ne peut plus. On a tout donné, toute son énergie, toute sa volonté, toute sa force. A un moment c'est trop dur et on a besoin d'une aide extérieure".
"Faire un bébé ce n'est pas uniquement biologique"
C'est là qu'intervient Deborah Schumann, thérapeute spécialiste de l'infertilité. Son travail : aider les couples à surmonter certains blocages. "Faire un bébé ce n'est pas uniquement biologique, il y a vraiment une part psychologique, explique-t-elle. Mon job c'est de définir et soulever les peurs et les blocages qui peuvent être liés à l'histoire qu'on a eue avec sa propre famille, qui peuvent être liés la relation que l'on a dans le couple. Parfois il suffit juste de trouver la clé pour ouvrir les portes et faire en sorte que le couple se sente libéré de certaines choses, lâche ses peurs et ses angoisses. Et là, on s'aperçoit qu'on a des résultats assez probants".
Et preuve que parfois, ça fonctionne, à 45 ans, après 10 ans de combat, Charlotte s'apprête aujourd'hui à devenir maman.