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Dominique Bernard: un an après l'attentat, Arras rend hommage au professeur par les arts

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Une cérémonie a eu lieu à 11h ce dimanche, place des Héros à Arras, en mémoire de Dominique Bernard. Ce professeur de lettres a été assassiné il y a un an jour pour jour par un ancien élève radicalisé, au sein du lycée dans lequel il enseignait. Le moment sera dédié à l'art, à la culture et à l'ensemble des victimes du terrorisme, et non aux discours politique, assure son épouse.

Textes, danse et chants ont accompagné l'hommage rendu dimanche 13 octobre 2024 par Arras au professeur Dominique Bernard, commémoré devant ses proches, des rescapés de l'attentat et plusieurs ministres, un an jour pour jour après son assassinat par un ex-élève radicalisé islamiste

Plus de 2.000 personnes, dont un grand nombre de parents venus avec leurs enfants, se sont rassemblées sur la place des Héros d'Arras (Pas-de-Calais), à l'endroit même où plusieurs milliers d'Arrageois affligés s'étaient retrouvés il y a un an, deux jours après l'assassinat du professeur de français, poignardé à l'entrée de la cité scolaire Gambetta-Carnot où il enseignait.

Une interprétation du quatuor K.285 de Mozart, de la danse contemporaine, une reprise de "Les enfants paradis" de Damien Saez, hommage aux victimes du Bataclan: la cérémonie a fait la part belle aux arts, conformément au souhait de son épouse Isabelle Bernard.

"Quelle plus belle réponse que des musiciens, des comédiens, des danseurs", a-t-elle dit à La Voix du Nord dans un entretien publié samedi, soulignant que les autres victimes du 13 octobre 2023 "ont aussi participé, par leurs idées, à construire cet hommage". Un autre professeur et deux agents de la cité scolaire avaient été blessés dans l'attaque.

"J'atteste qu'il n'y a d'être humain que celui qui combat sans relâche la haine en lui et autour de lui", lit un ami de Dominique Bernard, reprenant un texte du poète marocain Abdellatif Laabi. Sur scène, une artiste réalise en direct une grande toile représentant une colombe s'envolant au-delà d'une forme bleu-blanc-rouge et des mots "Liberté, égalité, fraternité".

Attentat d'Arras : le lycée Gambetta un an après le mort de Dominique Bernard
Attentat d'Arras : le lycée Gambetta un an après le mort de Dominique Bernard
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"Confiant en la République"

Michel, un retraité arrageois de 77 ans, est venu car il a "des enfants enseignants et des petits-enfants lycéens et collégiens". "Il nous semble important de montrer notre soutien à la fois aux enseignants et à tous ceux qui sont menacés", souligne-t-il, accompagné de sa femme.

Depuis la mort de Dominique Bernard, il se dit "toujours inquiet" pour ses enfants, "mais il faut rester confiant en la République". Venu en touriste de région parisienne, Philippe, retraité de 65 ans, souligne qu'"un peu de beauté dans cette période troublée, c'est toujours important" pour répondre à cette "atteinte à la République et à la laïcité".

Élève au lycée Gambetta, Yannis, 17 ans, salue une cérémonie "dans la continuité du combat (de Dominique Bernard), pour une France toujours plus culturelle, une France toujours plus respectueuse". Il ressent qu'au sein de l'établissement, "une sorte d'union" rassemble les élèves "autour de cet événement tragique".

En fin de cérémonie, il fait partie des centaines d'anonymes à se mettre en file derrière les proches du professeur, chacun déposant une rose blanche au pied d'une plaque en mémoire des victimes du terrorisme. Nombreux laissent couler quelques larmes, certains s'étreignent.

"Il y a un an, la ville d'Arras basculait dans l'horreur" et "un an plus tard, nous sommes ensemble, toujours debout", a déclaré à la tribune le maire centriste de la ville Frédéric Leturque, ajoutant avoir "une pensée" pour Samuel Paty, enseignant également victime d'un attentat jihadiste il y a bientôt quatre ans.

Le maire est le seul à avoir pris la parole, malgré la présence de plusieurs membres du gouvernement, dont les ministres de la Justice Didier Migaud, de l'Intérieur Bruno Retailleau et de l'Éducation nationale Anne Genetet. La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher, élue dans le Pas-de-Calais, ou l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, étaient également dans les premiers rangs.

"Amoureux de la littérature"

Dominique Bernard avait enseigné pendant 25 ans au sein de l'établissement où il a trouvé la mort. "Amoureux de la littérature, il aimait transmettre cet amour à ses élèves", se souvient sa soeur Emmanuelle Delatte dans un entretien à l'hebdomadaire chrétien Le Pèlerin, paru mercredi.

Une minute de silence sera observée lundi dans les collèges et lycées de France en hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie également assassiné par un jeune islamiste radicalisé le 16 octobre 2020, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines).

Lorsqu'ils avaient appris l'assassinat de Samuel Paty, Isabelle Bernard se souvient, dans un entretien au Monde, que son mari et elle-même avaient pris "conscience de (leur) vulnérabilité". "Qui sera le prochain ? Parce qu'il y en aura un", lui avait-elle dit.

RMC avec AFP