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"Ça ne répond pas ou ça nous raccroche au nez": toujours aussi dur de contacter les services publics

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À l'heure du tout numérique, ceux qui n'ont pas accès à Internet ou à un ordinateur se retrouvent souvent démunis. D'après une enquête publiée dans le magazine 60 millions de consommateurs ce jeudi, 3/4 des personnes qui appellent la Caf n'obtiennent pas de réponse.

"Toutes nos lignes sont actuellement occupées, nous regrettons de ne pouvoir vous répondre": cette réponse est souvent celle obtenue après avoir tenté de contacter un service public français par téléphone.

Une enquête dévoilée ce jeudi, avec la Défenseure des droits, sur les difficultés d'accès aux services publics pour les 15% de Français sans Internet est édifiante. Publiée dans le magazine 60 millions de consommateurs, cette enquête montre que presque rien n'a changé depuis leur précédente enquête il y a six ans.

Ça ne répond pas à l'Assurance Maladie dans 72% des cas et les 3/4 des personnes qui tentent de contacter la Caf n'obtiennent pas de réponse. Cela se passe mieux chez Pôle Emploi où 50% des appels sont traités.

Si certaines personnes sont en mesure de réaliser leurs démarches sur Internet, cela n'est pas le cas de tout le monde. Odile, 57 ans, vit avec 900€ d'allocations handicap et a deux enfants à charge. Elle a souvent besoin d'appeler la Caf ou la Sécurité sociale, mais elle parvient rarement à avoir quelqu'un au bout du fil.

"On n'est pas nés informaticiens"

"On peut téléphoner pendant une heure, ça ne répond pas ou ça nous raccroche au nez", déplore-t-elle.

Pire encore, même quand l'appel aboutit, la réponse n'est pas satisfaisante. On lui dit: "Envoyez nous votre mail, vous pouvez nous joindre sur tel site", explique-t-elle.

"On n’est pas nés informaticiens. Les gens qui ont un ordinateur arrivent à avoir tout facilement, alors que nous on patauge, on nous considère comme des moins-que-rien. Ils ont qu’à embaucher plutôt que tout informatiser", ajoute Odile.

Le témoignage d'Odile est loin d'être isolé. Nathalie, une auditrice de l'émission Apolline Matin diffusée sur RMC et RMC Story, a subi quelques déboires avec la Sécurité sociale et son service en ligne, Ameli.

En juillet 2022, la fille de Nathalie a fêté ses 18 ans et a donc fait la demande d'obtention de sa propre carte Vitale. Peu de temps après, elle a du se faire hospitaliser d'urgence tandis qu'elle n'avait toujours pas reçu sa carte.

Alors, en appelant le service Ameli de la Sécurité sociale, Nathalie décrit une situation "ubuesque". "On m'a demandé de prouver que j'étais bien sa mère. Je leur ai demandé de vérifier sur mon compte car ils auraient bien vu qu'elle était encore rattachée à mon numéro de sécurité sociale il y a quelques mois", développe l'auditrice.

La vérification n'est toutefois pas possible selon l'opérateur en ligne de la Sécurité sociale, qui demande à Nathalie de se connecter à l'espace personnel de sa fille sur Ameli. Problème : impossible de créer le compte de sa fille, car elle n'a pas encore la carte Vitale! Alertant sur cet imbroglio, les services de la Sécurité sociale répondent à la mère de famille que sa fille, hospitalisée, doit appeler elle-même...

Ce type de récits s'accumule selon les services publics. D'ailleurs, l'accès difficile à ces services est le motif n°1 des atteintes signalées à la Défenseure des droits. Les conséquences de ces manquements sont souvent pénalisantes, notamment pour les plus démunis.

Des conséquences importantes

Odile a pu avoir accès à un ordinateur dans un espace France Services, mais en attendant que ses démarches aboutissent, elle a dû puiser quatre mois dans ses faibles ressources pour avancer des frais de santé, normalement pris en charge.

"Les procédures tendent trop à renvoyer les usagers sur internet alors même qu’on explique qu’on n’a pas Internet, qu’on ne sait pas trop l’utiliser ou qu’on a un problème particulier. Il faut prévoir d’autres modes de relations avec l’usager, comme le téléphone et même les rendez-vous en physique", affirme Lionel Mauguin, auteur de l'enquête.

A ses yeux, c'est donc à "l’administration de s’adapter à la situation des gens, et non aux usagers d'être contre des murs d'incompréhension numérique". Suivez l'interview de Claire Hédon, défenseur des Droits, sur RMC et RMC Story à 7h40

Nicolas Traino (édité par AB)