Débat : pas de vainqueur... donc un perdant !

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC. - -
On avait beaucoup dit avant le débat que N. Sarkozy y jouerait son va-tout. Donc on savait qu’il allait attaquer, porter des coups, essayer de déstabiliser F. Hollande. Par moment, il est arrivé à le faire – sur le fait qu’il souligne les performances économiques allemandes mais qu’il propose une politique radicalement différente de celle de l’Allemagne ; ou sur le fait qu’il n’a pas voté l’interdiction de la burqa alors qu’il l’approuve aujourd’hui. Mais dans l’ensemble, on peut dire qu’il a parfois pris l’avantage mais jamais l’ascendant. Donc il n’a pas gagné ce duel et c’est pour lui une occasion perdue – sans doute la meilleure qui lui restait.
Est-ce que la ténacité, la solidité de François Hollande sont surprenantes ?
Pas du tout. C’est un excellent débatteur, on le savait, et il avait déjà montré dans les émissions de la campagne une très bonne connaissance des sujets. Quand il ne répond pas aux questions, c’est par habileté, non par incompétence. En réalité, dans ce type de duel, chacun campe sur ses positions et le spectateur ressort toujours convaincu par le candidat qu’il a choisi. Mais c’est le style qu’on remarque, la personnalité : on a vu que F. Hollande avait moins d’assurance mais pas moins de consistance. Il était physiquement dans le rôle du favori : moins agressif, plus posé. Plus le temps passait, plus N. Sarkozy s’en agaçait. Il sentait que la situation lui échappait. Et il avait raison.
Cela veut dire que dans l’ensemble, François Hollande a réussi à esquiver les attaques ?
Pas toutes, je l’ai dit – mais il ne s’est pas laissé démonter. Lui aussi a eu quelques bonnes séquences (notamment sur sa vision de la présidence). Surtout, il est parvenu à piéger N. Sarkozy en l’obligeant sans arrêt à justifier son bilan, dans un plaidoyer pro domo qui ne pouvait pas convaincre – parce qu’une majorité de Français connaît des difficultés. Le résultat, c’est que N. Sarkozy s’est retrouvé sur la défensive alors qu’il devait être offensif. Qu’il n’a pas pu insister comme il le voulait sûrement sur son argumentation spécifique envers les électeurs du FN. Et qu’il n’a pas réussi à « débusquer » F. Hollande, comme il se l’était promis, sur la partie la plus sensible: les mesures d’économie pour réduire la dette. Hollande s’est débrouillé pour ne jamais répondre à cette question.
Un dernier mot : le débat était très long. Après coup, peut-on se dire encore qu’il en aurait fallu plusieurs ?
Absolument. Deux ou trois débats d’1h30 seraient préférables à un seul de 3h. Ils seraient mieux calibrés, plus précis et on serait moins dans le spectacle – car c’en est un. Hier, on a vu deux très bons professionnels de la politique, avec leurs forces et leurs faiblesses. Mais ça manquait de hauteur, de dimension. Un duel unique, sous cette forme, ça permet davantage de mesurer l’état des hommes que de distinguer les hommes d’Etat.
Ecoutez ci-dessous le podcast intégral du Parti Pris d'Hervé Gattegno ce jeudi 3 mai :