Education sexuelle à l'école: pourquoi le nouveau programme fait-il débat?

Le projet de programme d'éducation à la sexualité à l’école ne semble pas plaire à tout le monde. Et il faut dire à qui en particulier: à des associations conservatrices qui veulent mobiliser sur la question. Et c’est vrai que c’est un sujet qui peut vite virer à la polémique et animer les discussions entre parents d’élèves.
Depuis 2001, la loi prévoit trois séances par an pour les élèves du CP à la terminale. Avec des programmes adaptés à leur âge. Seuls 15% des élèves en bénéficient en réalité. Depuis plus de deux décennies, la loi n’est donc pas respectée.
On attend un nouveau programme en la matière, et c’est une première version qui a réveillé ses opposants. Le texte fait consensus auprès des syndicats et principales fédérations de parents d’élèves. RMC vous en révélait les grandes ligne la semaine dernière. "Education à la vie affective et relationnelle", de la maternelle au CM2, consiste à connaître son corps, ses émotions, avoir conscience de son intimité. L’égalité entre les filles et les garçons, en encourageant la mixité dans le jeu. La famille, et ses différents modèles. Et puis la notion de consentement: est-ce que je dois accepter un bisou dont je ne veux pas, est-ce que je peux forcer à donner la main?
Puis, de la 6e à la terminale, "Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle". Ce dernier mot n’arrive qu’au collège. Là aussi, le programme est évolutif, en fonction des âges. Il sera question de sexualité donc, de contraception, de MST, de prévention, notamment vis-à-vis du numérique. Mais il sera aussi question de plaisir, d’acceptation de soi, d’assumer ses préférences. Ce n’est qu’un aperçu. Le texte fait 25 pages et détaille les notions ou encore l’apport des enseignants, en fonction des matières.
Qu’est-ce qui coince dans le texte?
Au-delà des différentes fake news qui peuvent circuler: non, on ne va pas apprendre à nos enfants à se masturber à l’école. Mais il y a bien des sujets qui coincent: l’homosexualité, l’identité de genre. Pour le Syndicat de la famille, issu de la "Manif pour Tous", le projet trahit une "influence woke" et développe "l’idéologie du genre".
"L’identité de genre fait partie des motifs de discriminations inscrits dans le code pénal", répond-on au ministère de l’Education nationale.
On a comparé la version du programme développé et révélé au mois de mars, qui était acceptée par ce Syndicat de la famille, et la version de cet automne. L’expression "identité de genre" n’apparaissait que deux fois, contre 17 aujourd’hui. C’est trop pour ces associations, SOS Education ou encore Parents Vigilants, collectif créé par Reconquête, le parti d’Eric Zemmour.
Il y avait donc un texte qui passait mieux au mois de mars mais qui n'a pas été confirmé. Parce que le sujet est très politique. Et le mois de mars, c’est une époque lointaine. Avant les européennes, avant la dissolution, avant les législatives. La nouvelle ministre de l’Education nationale s’est engagée sur ce dossier. Le texte n’est pas définitif et c’est elle qui va trancher. Le mois prochain, c’est bien Anne Genetet qui aura le dernier mot.
Le conseil supérieur de l’Education n’a qu’un rôle consultatif, et ces associations n’y figurent pas. Ce qui ne les empêche pas de faire monter le débat d’ici là. Ce genre de mobilisation avait déjà eu la peau des "ABCD de l’Egalité" de Najat Vallaud-Belkacem il y a 10 ans. Un programme de lutte contre le sexisme et les stéréotypes de genre.
50% des garçons de 12 et 13 ans vont sur des sites pornographiques tous les mois
Les défenseurs du programme ont des arguments aussi. Les enfants sont déjà exposés au porno, parfois livrés à eux-mêmes. 50% des garçons de 12 et 13 ans vont sur des sites pornographiques tous les mois. Raison pour laquelle Sidaxxxion.fr a lancé ce mardi une campagne, avec un site de vidéos de prévention qui singe les sites pornos. Il y a l’enjeu sanitaire, l’enjeu de protection de l’enfance: 160.000 enfants sont agressés sexuellement chaque année.
Enfin, les représentants des enseignants et des parents d’élèves demandent un programme officiel pour "légitimer" les trois séances annuelles, pourtant déjà inscrites dans la loi.