Laïcité, autorité des profs, "charte des parents": le Sénat préconise des mesures pour l'école

Un rapport sénatorial issu d'une commission d'enquête a pointé ce mercredi 6 mars la "terrible solitude" des enseignants face aux menaces et agressions, exhortant l’État à enclencher une "démarche proactive" et l’Éducation nationale à "reprendre la main" pour défendre la laïcité à l'école.
Cette commission d'enquête parlementaire a une histoire. C’est la sœur de Samuel Paty, Mickaëlle Paty, qui a écrit au président du Sénat Gérard Larcher pour lui demander de se pencher sur les dysfonctionnements qui ont permis la mort de son frère. La lettre est poignante. Elle y raconte le hurlement de douleur de sa mère lorsqu’elle apprend la décapitation de son fils.
Mettre fin au "pas de vague"
Gérard Larcher l’a entendue. Une commission d'enquête s’est mise au travail en juin 2023. Pendant ses travaux, un autre drame est survenu, l’assassinat à Arras du professeur de lettres Dominique Bernard. Après plusieurs mois d'enquête et l'audition d'une cinquantaine de personnes, les sénateurs ont rendu leur rapport ce mercredi.
Les conclusions sont assez sévères envers l'Éducation nationale. Elles dénoncent la fameuse politique du “pas de vague”, qui consiste à étouffer les problèmes. Le rapport propose d’y mettre fin, en répondant systématiquement à toutes les incivilités et toutes les atteintes contre le personnel. Il préconise également, afin de les enregistrer, la création d'un registre national.
Défiance entre l'administration et les enseignants
Les rapporteurs du Sénat, François-Noël Buffet (LR) et Laurent Lafon (UDI) , ont constaté ce qu’ils appellent “la terrible solitude” vécue par les enseignants. Les professeurs, seuls, font face à un quotidien marqué par les tensions et les conflits.
Selon Laurent Lafon, les enseignants font également face à une hiérarchie hostile. Le sénateur pointe une méfiance croissante entre l’administration et les acteurs sur le terrain. Il évoque, selon lui, un mur qui se dresse entre les enseignants et les rectorats. C’est un réquisitoire contre ce qu’on a appelé parfois le mammouth de l’Éducation nationale.
Augmentation des violences envers le personnel
Le rapport fait également état d'une augmentation des violences, et ce dans toutes les écoles: en banlieue, en centre-ville et en zone rurale. 37.000 menaces ont été recensées contre les professeurs des écoles, en provenance d'enfants âgés de moins de 11 ans.
Dans les collèges, 17.200 enseignants ont été victimes de violences ou de bousculades intentionnelles. En conséquence, les démissions sont en hausse constante: plus 36% sur un an au dernier recensement.
Le rapport issu de la commission d'enquête sénatoriale préconise ainsi l'application de 38 mesures pour conforter la laïcité, rétablir l’autorité des professeurs et améliorer la sécurité au sein des établissements.
Renforcer la laïcité et l'autorité des enseignants
La première étant symbolique mais importante: instaurer à la rentrée une journée en hommage aux enseignants assassinés. Une autre propose d'étendre l’interdiction du port de signes religieux aux activités extrascolaires, uniquement pour les élèves et non les parents accompagnateurs.
Concernant la sécurité dans les établissements, le texte souhaite l'installation de boutons d’appel d’urgence mais aussi des caméras de surveillance. Le tout accompagné de procédures simplifiées pour porter plainte et davantage de coopération avec les polices municipales.
L'autorité des professeurs doit être restaurée, toujours selon le rapport. Aussi, le texte préconise de rappeler aux parents qu’ils n’ont pas le droit de contester, ni les enseignants, ni leur enseignement, et ce en créant un délit pénal pour les parents pour non-respect des règles de fonctionnement.
Enfin, les sénateurs proposent également des structures spéciales pour les élèves hautement perturbateurs ou qui ont été plusieurs fois exclus.