"Il y a un désir de retrouver des liens": les Français veulent rompre avec la solitude

Vers la fin de la génération "plaid-cocooning?" Lors de la crise sanitaire liée au covid-19, débutée en mars 2020, la France a connu dès lors deux confinements, qui ont imposé à la population de se cloître chez soi et de limiter au maximum les interactions sociales. Si certaines personnes ont très peu gouté à ces restrictions, les jugeant liberticides et/ou traumatisantes, d'autres s'en sont facilement accomodées.
Depuis, les études ont souligné que l'isolement et la solitude avaient fortement gagné du terrain, notamment chez les jeunes. Près de la moitié des Français (46 %) déclarent se sentir "seuls", que ce soit "souvent" (9 %) ou "parfois" (37 %), selon les chiffres de l'étude "De la solitude choisie à la solitude subie", publiée en juin 2023 pour la fondation Jean Jaurès. Mais à en croire Jérémie Peltier, son co-directeur, la tendance serait en train de s'inverser.
La flemme, un "terme structurant"
Celui-ci l'a assuré ce mercredi au micro de RMC, dans Estelle Midi, "nous ne sommes pas tous devenus des flemmards". Mais l'utilisation du terme "flemme", notamment par le marketing dans les campagnes de publicité, démontre selon lui qu'il s'agit désormais d'un "terme structurant". "Beaucoup de Français, notamment la jeune génération et on le voit depuis le covid, se disent beaucoup plus fatigués qu'ils ne l'étaient auparavant, beaucoup plus lassés, plus fatigués pour sortir de chez eux et faire des activités", a-t-il expliqué.
L'auteur de La fête est finie?, paru en 2021, a insisté sur ce point: "La jeune génération est de plus en plus touchée par la flemme de voir l'autre, d'être avec autrui". Et de citer les changements qui se sont opérés ces dernières années, comme le fait de privilégier les soirées en appartement plutôt que les lieux de sociabilité comme les bars ou restaurants. "Beaucoup de jeunes se disent fatigués le vendredi soir, ils ne veulent plus sortir."
Des pratiques de consommation qui favorisent la sédentarité
"Ces personnes solitaires sont en priorité des jeunes (18-24 ans : 71 %), des personnes modestes (revenus inférieurs à 1 000 euros : 67 %) et des habitués des réseaux sociaux (utilisateurs quotidiens de cinq réseaux sociaux au moins : 79 %) – comme si les réseaux sociaux, loin de combler les solitudes, constituaient au contraire une réponse, peut-être souvent vaine, à un manque", peut-on lire dans l'étude de la fondation Jean Jaurès.
Mais la population n'avait pas attendu toutefois le covid-19 pour augmenter sa sédentarisation, en témoignent les pratiques de consommation qui favorisent, elles aussi, le domicile. Exemple: les services de livraison comme Uber et les services de streaming comme Netflix etc. Une économie qui a d'ailleurs grandement profité du covid-19 et qui s'est depuis renforcée.
Toutefois, il semblerait que cette tendance à l'isolement et à la solitude, qu'elle soit subie ou volontaire, perde désormais du terrain, a avancé Jérémie Peltier. "Depuis ces derniers mois, on voit en effet un regain du désir de sociabilité. On a une population qui n'avait jamais été aussi sédentaire depuis 20-30 ans."
"Ce mode de vie est en train de faire souffrir des gens, de les rendre malade en termes de santé mentale. Il y a un désir de retrouver des liens, notamment avec des gens qu'on ne connaît pas", a détaillé Jérémie Peltier.
"Ce n'est pas très amusant de se recroqueviller sur son cocon", selon lui. Et ces pratiques ne sont pas anodines à la baisse de la sexualité chez les jeunes, "il y a un lien entre les deux sujets."