RMC
Société

"La société ne veut plus s'occuper des plus vulnérables": l'avis tranché d'Arthur Chevallier

placeholder video
"Les Ogres", le dernier livre de Victor Castanet, révèle des scandales dans des crèches privées. Et pour l'écrivain et éditeur Arthur Chevallier, les coupables, ce ne sont pas les entreprises, mais la société, qui ne veut plus s’occuper des plus vulnérables. C’est son avis tranché dans "Apolline Matin" ce mercredi sur RMC.

Les Français sont, en réalité, confrontés à leur hypocrisie face à ce scandale dans les crèches privées. Ils font semblant de découvrir qu’une entreprise ne peut pas remplacer des parents. Franchement, à quoi fallait-il s’attendre? Leur but, c’est de faire des profits, pas de rendre des bébés heureux. Ça n’excuse rien et ces crèches doivent être sanctionnées, mais si on y réfléchit bien, les premiers fautifs, c’est nous, les Français. On est indignés, mais on s’en veut surtout d’avoir voulu échapper à nos responsabilités vis-à-vis de nos propres enfants. Cette société refuse de voir la vérité en face: elle ne veut pas s’occuper des plus vulnérables.

Alors, le vrai scandale, c’est bien le fonctionnement de la société. Quand on y pense, c’est même ridicule. On préfère travailler pour payer des gens qui s’occupent des enfants et des personnes âgées au lieu de le faire nous-mêmes. Le temps qu’on passe à gagner de l’argent, on pourrait le consacrer directement à s’occuper de nos proches. Depuis la France, ce fonctionnement nous paraît évident, mais ça ne se passe pas comme ça partout ailleurs.

En Afrique, en Asie, dans les pays de l’Est et même parfois aux États-Unis, plusieurs générations vivent sous le même toit. Ceux qui sont en pleine forme s’occupent de ceux qui ne le sont pas. C’est un fonctionnement plutôt logique: nous nous occupons de bébés qui s’occuperont à leur tour de nous quand nous serons vieux. Mais l’Occident est devenu tellement matérialiste qu’il pense que l’argent peut tout remplacer, même le temps.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : Notre société ne veut plus s’occuper des vulnérables - 18/09
3:19

"L’Etat devrait reprendre la main sur les crèches"

Ainsi, il faudrait tout faire nous-mêmes. Ou autre solution: laisser ça à l’État. Et là, on touche un autre aspect du problème. Celui de la disparition des services publics. Privatiser à outrance, ça a des conséquences. Ça permet de faire des économies dans un premier temps, mais ça finit toujours par être hors de prix.

On a privatisé nos autoroutes: se déplacer n’a jamais été aussi cher et les péages sont devenus une entreprise de racket organisé. On a cédé nos turbines nucléaires à l’entreprise américaine General Electric pour finalement les racheter à prix d’or. Ailleurs, le résultat est tout aussi catastrophique. Depuis que l’Angleterre a privatisé ses transports, ils n’ont jamais aussi mal fonctionné.

Il y a des industries et des services qui doivent être préservés à tout prix. Les crèches en font partie. L’État devrait donc reprendre la main sur les crèches. Le service public, ce n'est pas seulement un modèle économique. C’est une philosophie et un idéal: prendre soin de notre maison commune. C’est un modèle qui coûte un peu cher, mais, sur le long terme, c’est très rentable. Et une société, ce sont aussi des symboles.

Est-ce que la France peut accepter qu’on maltraite ses bébés? Ils sont l’avenir du pays, prendre soin d’eux, c’est prendre soin de notre avenir. C’est une cause nationale. Il en va de notre sens de la dignité, et la dignité, ce n’est pas négociable.

Arthur Chevallier