Laïcité: "C'est la religion musulmane qui est très genrée et discriminatoire, pas la loi", juge Fatiha Agag-Boudjahlat

La laïcité, un principe en perte de vitesse en France? C'est ce qui ressort de deux sondages publiés en amont de la journée de la laïcité marquant samedi la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat.
Selon un sondage Ifop publié vendredi et réalisé auprès de Français musulmans, 78% d'entre eux estiment que "la laïcité telle qu'elle est appliquée aujourd'hui par les pouvoirs publics est discriminatoire envers les musulmans".
Fatiha Agag-Boudjahlat, essayiste et principale adjointe d'un collège en Bourgogne, connue pour ses prises de positions en faveur de la laïcité, estime qu'il faut tempérer ces résultats "chocs" ce sondage comportant "des biais" selon elle.
"Quand on pose des questions à une communauté, elle vous répondra en tant que communauté. Je pense que les réponses sont biaisées car les gens pensent faire un acte de foi en répondant. Du genre: 'Oui je suis un vrai musulman, donc je pense qu'il ne doit y avoir aucune limite à la pratique de ma religion'", illustre-t-elle dans Apolline Matin sur RMC ce vendredi.
"C'est le fruit de toute cette panique identitaire"
Elle estime toutefois que ces résultats ne sont pas surprenants au regard de la tendance à une sorte de "traditionnalisation" de la pratique du culte musulman en France.
"C'est le fruit de toute cette panique identitaire présentant les musulmans comme des victimes perpétuelles, tous ces influenceurs sur les réseaux sociaux, la mode des abayas... C'est le fruit d'une orthodoxie qui s'installe tout doucement", assure-t-elle.
43% des jeunes favorables au port de signes religieux ostensibles dans les lycées
Le terrain de "combat" de la laïcité le plus essentiel est l'école, selon Fatiha Agag-Boudjahlat, alors que 68% des jeunes estiment que "la pratique de la laïcité devrait évoluer en France" et 43% des jeunes Français se disent favorables au port de signes religieux ostensibles dans les lycées publics.
Selon l'étude Ifop, 65% des Français musulmans souhaitent que les couvre-chefs religieux puissent à l'avenir être portés par les élèves dans les collèges et lycées et même 73% pour les vêtements amples type abayas et qamis.
"Si les filles musulmanes ont l'impression qu'elles sont plus ciblées par les lois, c'est parce que la religion musulmane a plus d'exigences envers les filles que les garçons", estime-t-elle.
"C'est aux filles d'être pudiques, de se couvrir, d'être discrètes, de ne pas montrer leurs corps au cours de natation... C'est la religion musulmane qui est très genrée et discriminatoire, pas la loi", juge-t-elle.
Dialogue et fermeté sont les maîtres-mots à avoir selon Fatiha Agag-Boudjahlat, pour éviter un maximum les incidents liés à la religion à l'école.