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Le mauvais coup de Wauquiez

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi.

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi. - -

Pour avoir critiqué le RSA et dénoncé « l’assistanat », Laurent Wauquiez a été recadré mercredi par Nicolas Sarkozy, mais il a reçu le soutien de beaucoup de députés et des dirigeants de l’UMP. Il peut donc se flatter d’avoir réussi son opération. Pourtant, le bon coup de Wauquiez mériterait… un bon coup de pied au derrière !

J’ai été horripilé d’entendre depuis le début de la semaine des politiques et des commentateurs qui estimaient que Laurent Wauquiez avait bien joué, qu’il avait été habile ou qu’il avait marqué des points. En fait, il a provoqué – ou souligné – une fracture au sein de la majorité ; il a mis en évidence une nouvelle faille dans l’autorité du président ; et il a fait faire un pas de plus à l’UMP sur sa droite en désignant comme des profiteurs les personnes les plus défavorisées de la société française. Venant d’un démocrate chrétien qui passait pour un centriste, se changer d’un seul coup en ultra-libéral, ça me paraît moins habile que cynique. Et sur le fond, assez désolant.

Laurent Wauquiez revendique la volonté de ramener vers l’UMP un électorat populaire, qui est aujourd’hui tenté par le Front national. Est-ce qu’on peut lui donner tort ?

Il faut se méfier des fausses évidences. Qu’il y ait une part croissante des classes moyennes inférieures de notre pays qui vit cruellement la baisse de son niveau de vie, c’est évident. Et que cette frustration, cette irritation se double d’une rancœur à l’égard de ceux qui ne travaillent pas – et encore plus quand ce sont des étrangers – on le sait bien. Ça ne veut pas dire que le rôle d’un responsable politique soit de flatter ces sentiments-là. Il est toujours plus facile de dénoncer les pauvres que de combattre la pauvreté. Ça n’a jamais produit de résultats. Même pas électoraux.

Nicolas Sarkozy a demandé à l’ancien ministre Marc-Philippe Daubresse de faire des propositions pour améliorer le RSA. C’est bien que le système est perfectible, non ?

Personne ne dit le contraire. Même pas Martin Hirsch, qui en est le concepteur. Il n’empêche que le RSA figure en bonne place dans la belle brochure éditée par l’Elysée sur le bilan de Nicolas Sarkozy. C’est dans la partie qui est intitulée : « Bâtir une France plus juste » et au chapitre « Réhabiliter le travail ». Sur ce coup-là, on ne peut pas dire que Wauquiez, lui, réhabilite le travail… du gouvernement ! Alors vous savez qu’il jure qu’il a lancé son opération avec l’aval de l’Elysée. Je ne sais pas si c’est vrai – personne à l’Elysée ne le confirme en tout cas – mais si c’est le cas, ça signifie que Nicolas Sarkozy a définitivement renoncé à la dimension sociale de sa politique. Et qu’il l’a fait après la rédaction de cette plaquette. C’est-à-dire il y a très peu de temps.

Ce qui peut renforcer cette impression, c’est que la sortie de Laurent Wauquiez a précédé de peu l’annonce de la réforme de l’ISF qui va diminuer l’impôt des plus aisés…

Dénoncer l’abus des minima sociaux au moment où le gouvernement annonce que 300 000 foyers seront exonérés de l’ISF, c’est tellement génial qu’on a du mal à comprendre. Laurent Wauquiez prétend dire « tout haut ce que les Français pensent tout bas ». Pourtant, il ne dit pas un mot des bonus mirobolants que continuent à percevoir les grands patrons ni de cette réforme fiscale qui, en effet, profite aux catégories les plus aisées. L’addition de tout ça, je ne sais pas si c’est un bon coup, mais on peut être sûr que ça aura un prix.

Ecoutez «le parti pris» de ce jeudi 12 mai avec Hervé Gattegno et Jean-Jacques Bourdin sur RMC:

Hervé Gattegno