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"Les garçons jouent au foot et les petites filles à la dinette”: du sexisme dans les manuels de CP

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- - STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

REACTIONS - Entre une sous-représentation des femmes, des rôles sexués stéréotypés et un unique modèle familial… les manuels de lecture en CP ne transmettent pas l’égalité. C'est ce que dénonce une étude du centre Hubertine Auclert publiée ce mardi. Des stéréotypes sexistes qui font grimacer les parents d'élèves interrogés par RMC.

"Les garçons jouent au foot et les petites filles jouent à la dinette". Voici ce qu'a appris Thomine en parcourant son livre de lecture. Il faut dire que les stéréotypes sexistes s'apprennent dès le plus jeune âge. C'est en tout cas ce que révèle une étude sur les manuels scolaires publiée ce mardi par le centre Hubertine Auclert (centre francilien de ressources pour l'égalité femmes-hommes). Pour en arriver à de telles conclusions, deux chercheuses ont étudié, pendant six mois, page après page, 22 livres de lecture proposés en classe de CP.

Et le résultat est édifiant: les femmes restent sous représentées et cantonnées à des rôles secondaires. On compte ainsi deux personnages féminins par livre en moyenne contre cinq personnages masculins. Par ailleurs, les schémas très conservateurs persistent. Si les petits garçons jouent à la voiture et les papas gagnent de l'argent, les petites filles sont systématiquement en jupe, et les mamans restent à la maison. Des clichés qui, à la sortie des écoles, ne manquent pas d'indigner les parents d'élèves.

"C'est extrêmement choquant"

"Je vois que l'on essaye d'inculquer certaines valeurs dans ces manuels. Et en ce qui concerne les clichés sexistes, je pense que les livres n'ont pas trop à appuyer ce genre de choses", regrette Mathilde, la mère de Thomine. "C'est extrêmement choquant" estime de son côté Rodrigo Arenas, président de la Fédération des Conseils de Parents d'Elèves en Seine-Saint-Denis.

"C'est complètement à rebours de l'évolution de notre société, ajoute-t-il. Aujourd'hui des femmes exercent des métiers autrefois réservés aux hommes, et inversement. C'est donc mentir à nos enfants que de leur dépeindre une société qui n'existe pas, en tout cas qui n'est pas souhaitable par rapport au progrès et par rapport à la proposition qui est d'éveiller nos enfants à la société telle qu'elle est".

"On enfonce tous les stéréotypes"

Filles en rose et à la maison, garçons en bleu et qui se bagarrent, ces manuels font donc la part belle aux stéréotypes. Et quand une fille joue au foot, les clichés ne sont jamais bien loin comme le déplore Amandine Berton-Schmidt, co-auteure de l'étude: "Le texte qui accompagne ce visuel est extrêmement fort puisque la fille n'aime pas le foot, elle a peur de la balle, elle est terrifiée. Vraiment, on enfonce tous les stéréotypes que l'on a l'habitude de retrouver sur la femme et le foot".

Et de tirer un constat accablant: "C'est extrêmement grave car les manuels sont des vecteurs de savoir mais aussi de valeurs. Or, quand on les regarde de plus près, on se dit qu'ils ne réussissent pas à véhiculer l'égalité entre les filles et les garçons. Alors même qu'il s'agit d'une valeur de l'école républicaine". C'est pourquoi, la chercheuse compte bien encourager les éditeurs à modifier leurs ouvrages en vue des nouveaux programmes scolaires prévus pour la rentrée prochaine.

Léa Zacharie avec Maxime Ricard