Covid-19: pourquoi la France hésite-t-elle à fermer ses frontières?

A partir de ce lundi, la France renforce le contrôle de ses frontières pour se protéger du Coronavirus. Les voyageurs en provenance de pays extérieurs à l’Union Européenne devront faire un test PCR. Ça veut dire que jusqu’à dimanche, on pouvait venir en France sans aucune restriction sanitaire si l’on arrivait d’une quarantaine de pays. De toute l’Europe et d’une douzaine d’autres pays, comme l'Australie, le Japon, la Nouvelle Zélande ou encore la Thaïlande.
Pour le reste du monde, un test PCR de moins de 72 heures était exigé avant de monter dans les avions pour la France. Dès lundi les choses changent donc radicalement. Les ressortissants de tous les pays, hors Europe, devront avoir fait un test PCR avant leur départ. Puis signer sur l’honneur, qu’une fois arrivés en France ils s'isoleront pendant sept jours, puis qu'ils referont un deuxième test PCR au bout d’une semaine. On passe soudain à des mesures très contraignantes.
Qui est concerné? Pas beaucoup de monde en vérité puisque l'entrée dans l’espace Schengen était déjà interdite pour presque tous les pays du monde, sauf motif impérieux. Seront donc concernés par ces deux tests et par la semaine d’isolement, uniquement les voyageurs qui viennent pour une raison incontestable. Par exemple, les étrangers qui résident en France et qui reviennent chez eux.
Mais la mesure concerne aussi les Français qui rentrent de l’étranger. Si vous voulez partir au Maroc ou à Saint Domingue pour les vacances de février, et bien il faudra accepter de vous isoler une semaine au retour. Autrement dit, le nombre de séjours des français à l’etranger va encore considérablement baisser. A court terme, je crois qu’on va oublier le tourisme au soleil. D’autant que le ministre des outre-mer a annoncé dimanche soir que les voyageurs qui se rendent aux Antilles devront désormais s’isoler une semaine.
Que se passe-t-il pour les voyages à l'intérieur de l'Europe?
Les échanges sont bien sûr beaucoup plus nombreux à l'intérieur de l’Europe et parce que certaines zones de l’Europe sont devenues très très contaminées. C’est le cas de l’Irlande par exemple. Jean Castex a annoncé jeudi que des décisions seraient prises au niveau européen à la fin de cette semaine.
Mais le Premier ministre est resté très flou et cela s’explique. La fermeture des frontières européennes reste un sujet extrêmement sensible et la France est l’un des pays les plus réticents à l'idée de réduire la libre circulation en Europe.
En effet, la libre circulation des personnes et des biens, c’est l’alpha et l’oméga de la construction européenne. L'Europe s’est bâtie autour de cette liberté. Et la France est dirigée par des militants européens. Emmanuel Macron aujourd’hui, comme tous ces prédécesseurs depuis 60 ans.
Mais il n’y a pas que ces raisons idéologiques. Il y a une explication beaucoup plus pratique. C’est que fermer les frontières, c’est beaucoup plus facile à dire qu'à faire. Souvenez-vous, le 13 novembre 2015, le soir du Bataclan, François Hollande avait annoncé sur un ton martial que toutes les frontières françaises étaient fermées. Et deux heures plus tard, il avait fallu rectifier. Les frontières n’étaient pas fermées, c’étaient juste les contrôles qui étaient renforcés.
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Souvenez-vous plus récemment, juste avant Noël, on a fermé la frontière avec l'Angleterre à cause du nouveau variant du virus. Et aussitôt cela a été un chaos, des dizaines de kilomètres de bouchons de camion. L’économie anglaise asphyxiée, des milliers de Français coincés à Londres. Très vite, il a fallu rouvrir les frontières, pour les routiers, pour les résidents français en Angleterre et anglais en France. Et pour tous ceux qui ont une raison professionnelle de voyager. Bref la frontière britannique est contrôlée mais elle n’est pas fermée.
C’est pour cela que l’Europe cette semaine va décider de restreindre la circulation au sein de l'espace Schengen, mais avec beaucoup de précautions et beaucoup d'exceptions. On va tenir compte des millions de frontaliers qui habitent dans un pays et travaillent dans un autre. On va laisser circuler les camions, les trains et les avions. On va limiter les points de passage comme c’est déjà le cas depuis quelques jours entre la France et l'Espagne, mais on ne va pas fermer les frontières. En Europe c’est devenu presque impossible.