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Pourquoi le sujet des frontières à l'intérieur de l'Union européenne reste source de tensions

EXPLIQUEZ-NOUS - Le gouvernement est déterminé à empêcher les français d’aller skier à Noël chez nos voisins. Mais les mesures sont difficiles à mettre en place. Un épisode qui prouve qu’il est presque impossible désormais de fermer les frontières en Europe.

C'est le casse tête du moment: comment empêcher les Français d’aller skier en Suisse en Autriche ou en Espagne alors que les traités interdisent la fermeture des frontières? Jean Castex, sur RMC mercredi, a expliqué comment cela va se passer: des contrôles aléatoires auront lieu aux postes frontières franco-suisses par exemple. Les Français qui reviendraient du ski pourront être verbalisés, et placés pour sept jours à l’isolement.

Matignon a ensuite précisé que cet isolement pourrait être imposé, soit dans des hôtels proches des postes frontières soit aux domiciles des skieurs récalcitrants. Apparemment la loi d’Etat d’urgence sanitaire permet ces mesures coercitives, même si on a encore jamais vu ça en France.

En revanche, on ne peut pas fermer les frontières

Non. Les accords internationaux prévoient que les contrôles aux frontières nationales ne peuvent être que provisoires, aléatoires et non discriminants. C’est pour cela que le premier ministre a insisté sur le caractère aléatoire des contrôles. Pour rester dans les clous de Schengen.

Il y a d’autre part une autre raison pratique: 325.000 français travaillent en Suisse et passent la frontière tous les jours. Plus les Suisses qui habitent en France. Impossible de tous les contrôler matin et soir.

L’épidémie a tout de même entraîné la fermeture de nombreuses frontières

A la mi-mars, la plupart des pays européens ont décidé de restrictions à la libre circulation des personnes dans l’espace Schengen. Ce qui est possible pour une durée de 6 mois maximum en cas de crises graves.

Mais elles n’ont pas duré longtemps. Dès la mi-juin, l'Europe a encouragé les États membres à lever ces restrictions. Et rétrospectivement, il semble clair aujourd’hui que la frontière entre la France et l'Italie aurait dû être fermée bien plus tôt.

Dans les premières semaines de mars on savait que l'Italie était un foyer de contamination. Et on n’a pas empêché les Italiens de venir en France pour des raisons idéologiques. Il y a un dogme des frontières ouvertes. L’Europe depuis 35 ans, s’est construite en grande partie sur la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux.

Il y a d'indéniables avantages, en matière économique, en matières de commerce, d'échanges entre les gens, de création de richesses. Et d'indéniables inconvénients: le sentiment pour les peuples européens qu’ils ne contrôlent plus leur politique migratoire.

Un dogme qui est en train d’évoluer

Les choses bougent. Longtemps en France l'Europe sans frontières a été défendue par tous les partis politiques sauf la droite de la droite: Marine Le Pen ou Nicolas Dupont Aignan. Mais on a entendu ces derniers jours des leaders de gauche comme Arnaud Montebourg ou François Ruffin tenir des propos clairement favorables à plus de contrôles aux frontières. Le coronavirus est en train de faire bouger des lignes politiques

Le retour d'une vraie frontière UK-France

Pourtant il y a une frontière qui va sans doute bientôt se refermer. On sera fixés dans les jours qui viennent mais faute d'un accord de dernière minute, une vraie frontière à l’ancienne va revoir le jour entre la Grande-Bretagne et le reste de l'Europe.

Avec des contrôles stricts des marchandises et des droits de douane à payer. On s’attend dès le 1er janvier à des dizaines de kilomètres de bouchons des deux côtés. Les Anglais sont en train de lancer la construction d’une trentaine d’immenses parkings pour stocker les 10.000 camions qui doivent passer chaque jour. Les Anglais l’ont voulu. Ceux qui veulent des frontières plus hermétiques vont être servis.

Nicolas Poincaré (avec J.A.)