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L'hôpital public en "burn out": "C'est horrible, ce n'est plus de la médecine"

Edouard Philippe et Agnès Buzyn se rendent mardi dans un centre hospitalier afin de présenter le "plan de transformation de l’offre de soins". Et les chantiers sont nombreux: financement des hôpitaux, développement des soins des maladies chroniques, difficulté d’accès aux soins… Ca fait débat sur RMC.

Pour beaucoup de patients et de praticiens, l’hôpital français est malade. Et la situation ne semble pas s'améliorer au fur et à mesure des années et des gouvernements successifs. "Transformer le système de santé français".

C'est pourtant la thématique du déplacement ce matin du Premier ministre Edouard Philippe et de la ministre de la Santé Agnès Buzyn, ce mardi dans le Val- d'Oise. Ils présentent un "plan de transformation de l'offre de soins" depuis le centre hospitalier Simone-Veil d'Eaubonne. Le gouvernement souhaite s'attaquer à plusieurs chantiers: le système de financement, le développement des maladies chroniques, l’insuffisant développement de la prévention ou les difficultés d’accès aux soins.

"Il y a des jours, c'est de la maltraitance"

Pourtant, sur place, comme l'a constaté RMC, les chantiers sont urgents et sur tous les fronts. Comme à l’hôpital de Gonesse, dans le Val-d'Oise. Il est 19h50, l'heure de la fin de service pour le docteur Rachid Yazigi. Il fait le bilan de la journée: "Nous sommes à 176 patients aux urgences, médecine et chirurgie. Il y a des délais d'attente qui vont de 11h14 jusqu'au dernier qui vient d'arriver il y a 7 minutes. On a presque la moitié qui sont entre 3 et 7 heures d'attente. Et c'est notre vie quotidienne". Une "vie quotidienne" qu’il subit dans cet établissement depuis 24 ans. Avec une qualité de soins qui, selon lui, comme pour 67% des Français, s’est dégradée.

Rachid Yazigi a ainsi été parmi les premiers à signer la lettre ouverte envoyée à la ministre de la santé pour l’alerter sur le manque de moyens: "Est-ce qu'on ne fait pas vivre des maltraitances aux malades? Il y a des jours, c'est de la maltraitance. On a une infirmière par étage, une pour trente patients avec une aide-soignante, la nuit... Sept minutes par malade, mais c'est horrible. Ce n'est plus de la médecine" lâche-t-il. 

"Qu'on nous laisse soigner nos malades!"

Quelques mètres plus loin, en neurologie, Olivier Varnet avoue que "L'hôpital ne tient aujourd'hui qu'avec la dévotion du personnel. On leur demande de revenir le jour de leur mariage, pendant leurs vacances. Le personnel se retrouve avec le choix de travailler 12, 13 heures, de ne plus voir sa famille ou laisser tomber le malade. C'est ça la pression, c'est ça notre souffrance. Qu'est-ce qu'on doit faire? Stop! Qu'on nous laisse soigner nos malades!"

L'hôpital de Gonesse est-il un cas isolé? Pas franchement. RMC a interrogé Guillaume, un aide-soignant en psychiatrie à Toulouse. Pour lui, c'est tout "le système de l'hôpital public qui est malade. Ca fait quatre ans que je le vois. Il est de plus en plus gangrené, de plus en plus dans l'irrespect, dans le manque d'altruisme. La bienveillance, c'est quelque chose qui n'existe plus. On nous met la pression chaque jour un peu plus. On a l'impression qu'à l'heure actuelle, on facture des coups d'hospitalisation plutôt que de trouver des solutions à tous les maux des gens. Et puis nous, on nous dit que ce n'est pas à nous d'être social, d'écouter les gens".

Selon une étude internationale publiée dans la très sérieuse revue The Lancet, en 2015, la France pointe au 15e rang mondial des systèmes de santé, entre l’Autriche et la Belgique. Les chercheurs ont analysé la qualité des soins prodigués sur 32 pathologies mortelles. Si le système hexagonal est bon élève en terme de qualité et d’accès aux soins, il est très mauvaise en terme de risques liés aux soins: maladies nosocomiales, effets secondaires des médicaments. Des milliers de morts pourrait être évités chaque année si l’on s’attelait à l’organisation des soins et à la formation des soignants, rappelle cette étude.

Matthieu Rouault & X.A