"Mon enfant est déconnecté, absent, comme un zombie": faut-il interdire les écrans aux moins de 3 ans?

Le gouvernement continue sa lutte contre les écrans au près des jeunes. La ministre de la Santé Catherine Vautrin a annoncé, dans un entretien accordé au JDD, qu'elle allait publier, dans les prochaines semaines, "un arrêté interdisant les écrans" dans les lieux d'accueil d'enfants de moins de 3 ans. Une interdiction qui, selon elle, devra s’appliquer "partout, y compris à la maison".
C'est une façon "d'insuffler l'idée que ça ne se fait pas", espère la ministre, qui y voit un parallèle avec l'interdiction de la fessée. "La police n’est pas allée vérifier dans les foyers si l’interdiction était appliquée, mais le fait de la proclamer a fini par ancrer l’idée "qu’on ne tape pas un enfant, même d’une petite fessée", a expliqué Catherine Vautrin.
La solution de facilité
L'interdiction des écrans avant 3 ans est une recommandation diffusée depuis 2008, mais elle reste très peu appliquée. 86% des parents ne la suivent pas selon une étude de Santé publique France. Cette dernière précise qu'à 2 ans, un enfant français passe en moyenne 56 minutes par jour devant un écran. Le chiffre grimpe à 1h20 à 3 ans et demi, puis 1h34 à 5 ans et demi.
"J'hallucine que des enfants regardent autant les écrans", se désole Mathilde, mère de six enfants.
Cette maman au foyer avoue ne pas avoir d'écran à son domicile à part son téléphone et celui de son mari. "Il va falloir aussi que les parents soient un peu plus responsables", affirme-t-elle au micro de Estelle Midi.
Mathilde raconte notamment l'histoire de l'une de ses soeurs qui avait mis ses enfants dans une crèche à Paris: "Ils proposaient des cosys (transats pour bébé, ndlr), avec un bras où les parents pouvaient laisser un téléphone pour surveiller leur enfant pendant la journée, mais ils pouvaient aussi dire à la dame de la crèche que leur enfant avait le droit de regarder un petit dessin-animé."
"Ils n'en font qu'à leur tête"
Le problème de l'exposition aux écrans peut donc venir des personnes en charge de la garde de l'enfant. Mère d'un petit de 7 ans, Haydé est confrontée à cette situation lorsqu'elle laisse son fils aux grands-parents: "Quand je le laisse, ils ont des tablettes et la télé, je le vois tout de suite quand je le reprends, mon enfant est déconnecté, vraiment absent."
"Quand je lui parle, on dirait un zombie", se désolé Haydé.
"Je ne peux pas les fliquer, leur dire ce qu'ils sont censés faire parce que de toute façon ils en feront qu'à leur tête. Ma mère j'essaye de lui en parler, mais ils n'en font qu'à leur tête", regrette la maman. Cette dernière confie, sur RMC, se faire souvent "convoquer par l'école" parce que son fils est "absent une fois sur deux", pas concentré sur ce qu'il se passe en classe.
Des risques pour le développement du cerveau
Haydé remarque que ce n'est pas le cas quand c'est elle qui s'en occupe: "Quand je resserre la vis, que je suis toute seule avec mon fils, je vois tout de suite la différence. Il est plus présent, il a plus envie, il est plus connecté au monde réel." Cette mère de famille voudrait même qu'une loi soit votée pour interdire les écrans "avant 12 ans".
Passer trop de temps devant les écrans peut avoir des effets négatifs sur la santé des enfants. Cinq sociétés savantes ont publié, fin avril, une tribune dans laquelle ils défendaient l'interdiction des écrans avant l'âge de 6 ans car "ils altèrent durablement la santé et les capacités intellectuelles.
Les professionnels de santé signataires listaient des "retards de langage, troubles de l'attention, de la mémorisation et une agitation motrice" parmi les effets dûs à l'exposition aux écrans dès le plus jeune âge. "Les écrans altèrent la construction du cerveau", concluaient les experts.