Un congé en cas de rupture amoureuse: “C’est une idée complètement débile”, pour Yael Mellul

Utilise ou absurde? C'est un projet de loi du député Lordan Suan, parlementaire de Cagayan, dans le sud des Philippines: mettre en place un congé maladie en cas de rupture amoureuse.
Selon lui, dans les jours qui suivent une rupture ou un divorce, le salarié est affecté et donc moins productif, ce qui représente un impact négatif pour l'entreprise. Il propose ainsi un congé non rémunéré de trois jours maximum pour se remettre de son chagrin d'amour. Ce congé est utilisable une seule fois par an.
Le syndrome du coeur brisé
Trois jours pour les plus de 36 ans, deux pour les 25-35 ans et un seul pour les moins de 25 ans. La demande de congé devra se faire 48 heures avant. Certaines entreprises ont déjà mis en place un congé annuel de rupture aux Philippines, comme un hôtel sur l'île de Cebu, qui autorise cinq jours de congé dit "chagrin d'amour".
Seul bémol: il n'y a pas encore de moyens mis en place pour vérifier qu'un personne vit bien une rupture amoureuse douloureuse. Par ailleurs, les études le prouvent, la rupture peut avoir des conséquences concrètes sur la santé: état dépressif, essoufflements cardiaques ou douleurs thoraciques.
Cela porte même un nom: le tako tsubo, le syndrome du coeur brisé. Ça concerne le plus souvent les femmes de plus de 50 ans et les experts insistent sur le fait que son taux de mortalité pendant la phase aiguë est du même ordre de grandeur que celui d'une obstruction soudaine d'une artère. Le chagrin d'amour déformerait même la ventricule gauche…
"On est dans une société d’assistés"
C’est donc le débat ce mardi 22 octobre dans Estelle Midi: faut-il mettre en place un arrêt maladie en cas de rupture amoureuse? Si elle a connaissance du syndrome du coeur brisé, Yaël Mellul, ancienne avocate et présidente de l’association “Femme et Libre”, trouve cette idée “complètement débile”.
“On est tous confrontés au moins une fois dans sa vie à une rupture douloureuse. Si on n'est pas bien, on se met simplement en arrêt maladie. Pas besoin de créer un congé spécifique”.
Avis partagé par Pierre-Edouard Magnan, président du mouvement national des chômeurs et précaires. “C’est une idée fondamentalement absurde, mais surtout très révélatrice de la société dans laquelle on vit. Une société très superficielle et ultra-individualiste”.
Pour Daniel Riolo, ce congé est impossible à mettre en place sur le fond comme sur la forme: “comment on définit la durée du congé? Comment on évalue par rapport à la durée de la relation? Comment évaluer le degré d’amour et donc le degré de souffrance?”, questionne le chroniqueur.
“On est dans une société d’assistés. Aujourd’hui, si on ne nous tient pas la main, on est perdus”, conclut Karim, un auditeur.