"Une médecine de ville moribonde": avant le CNR, le Dr Jérôme Marty sonne l'alarme
"La France s'est tirée une magistrale balle dans le pied en cassant ce qui faisait sa richesse: une médecine libérale forte aux côtés d’un hôpital fort", selon Jérôme Marty, médecin généraliste, membre des "Grandes Gueules" sur RMC et président de l’UFML, qui était l'invité d'"Apolline Matin" sur RMC et RMC Story, ce lundi.
C'est, ce lundi, que s'ouvre le volet "santé" du Conseil national de la refondation (CNR), au Mans. Cette grande conférence sur le système de soins, souhaité par Emmanuel Macron, réunit des citoyens, des élus et des professionnels de santé, dont Jérôme Marty.
Au programme: le défi de l'accès aux soins et la lutte contre les déserts médicaux. D'après les maires ruraux de France, il manque plus de 6.000 généralistes dans les campagnes. Les territoires ruraux ne sont, d'ailleurs, pas les seuls concernés. "Le premier désert médical, c’est l’Île-de-France ", affirme Jérôme Marty.
10% des Français n'ont pas de médecin généraliste
"On a beaucoup parlé de l'hôpital depuis des années et on a totalement oublié la médecine de ville et c’est ainsi que lentement, celle-ci s’est dégradée. Aujourd'hui, on se retrouve avec une médecine de ville moribonde", ajoute le professionnel.
Au total, 10% des Français n'ont pas de médecin traitant. Et un rapport du Sénat, paru en mars, montre que cette tendance est en hausse depuis 2020.
D'après lui, il y a de moins en moins de médecins généralistes. "On en a perdu 10.000 en 10 ans et ça va continuer pendant encore 10 ou 15 ans."
"Il va falloir beaucoup d'argent et beaucoup de volonté"
La faute à qui? Selon Jérôme Marty, c'est dû à "de mauvaises politiques médicales". Par conséquent, "on se retrouve avec un hôpital malade et une médecine moribonde donc il faut sortir de ça, mais pour cela, il va falloir beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent et beaucoup de volonté", insiste-t-il.
Entre 2017 et 2021, le nombre de médecins généralistes par département, par rapport à la population, a diminué de 1 % par an.
"Le but du CNR, c'est d'écouter et essayer de voir les différences entre les territoires, il n'y a pas un seul désert qui ressemble à un autre. Ensuite, il faut construire avec les professionnels du soin et ses corps intermédiaires que sont les syndicats".
Augmenter les prix des consultations?
Quelles pourraient être les solutions? Pour le docteur Jérôme Marty, il faut "revoir toute la nomenclature et la hauteur des actes car il y a des tarifs qui n’ont pas été réévalués depuis des années". Il faut donc, selon lui, augmenter les prix des consultations. "La moyenne européenne est à 50€, alors qu'ici c'est 25. Il faut donner, aux professionnels, les moyens de faire une médecine de qualité".
Autre possibilité pour que les malades puissent avoir des rendez-vous plus rapidement, "nettoyer nos professions des actes qui ne servent à rien, comme des arrêts de travail d'un ou deux jours ou encore des certificats de sport, pour libérer du temps pour ces médecins". Il faudrait, selon lui, que ces professionnels puissent avoir la possibilité d'employer des salariés, comme des assistants.
"Aujourd'hui, la plupart des médecins n'ont même pas les moyens d'avoir une secrétaire", déplore le docteur Jérôme Marty.