Sarkozy arrêtera s'il perd: acte de responsabilité, faute de campagne...

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, tous les matins à 8h20 sur RMC. - -
La parole de N. Sarkozy est si dévaluée qu’on a du mal à entendre ce qu’il dit au 1er degré. Beaucoup de commentateurs, d’adversaires et simplement de Français ont pensé, en l’entendant, que c’était un coup tactique, une manœuvre pour émouvoir l’opinion et (re)mobiliser son électorat. Il n’empêche qu’il faut d’abord considérer sa phrase pour ce qu’elle est : un engagement qui honore le responsable politique qu’il est. Il y a une certaine hauteur à prévenir que s’il est battu, il se retirera, qu’il ne campera pas devant l’Elysée. En disant cela, il ne brandit pas une menace ; il énonce une évidence. Un candidat battu, c’est quelqu’un qui a perdu la confiance des Français. Ça ne prédispose pas à devenir du jour au lendemain le chef de l’opposition pour préparer des alternances futures.
Peut-on vraiment imaginer Sarkozy abandonner la politique ?
Il y sera de toute façon obligé un jour au l’autre. Et rappelons-le, c’est lui qui a fait interdire par la Constitution de rester à l’Elysée plus de deux mandats. Surtout, je crois que pour lui, la question doit être posée dans l’autre sens : quelle autre fonction pourrait-il exercer demain s’il ne quittait pas la politique – a fortiori après une défaite ? On ne l’imagine pas ministre d’un autre, ni revenir à la mairie de Neuilly – et député, pour quoi faire ? ça ne correspondrait ni à son tempérament ni à son histoire personnelle. N. Sarkozy n’était pas prédestiné, comme ses prédécesseurs, à appartenir à la caste dirigeante. Il ne vient pas des grands corps de l’Etat, il n’est pas arrivé au pouvoir par le haut. C’est un militant qui a gravi les échelons – très vite, mais en partant du bas. Il est arrivé au sommet. Je crois qu’il le vit plus comme un exploit que comme un destin. Il ne reviendra pas en arrière.
Pourquoi sa déclaration est une faute de campagne
Parce que dans une campagne présidentielle, la sincérité n’est pas toujours payante. Pour ses partisans, découvrir que N. Sarkozy ne pense plus seulement à la victoire le matin en se rasant, ce n’est pas forcément enthousiasmant – ça peut même les inquiéter. Pour beaucoup d’entre eux, envisager la retraite c’est déjà battre en retraite. Plus grave : toute sa stratégie a consisté jusqu’ici à essayer de s’extraire du piège du référendum « pour ou contre Sarkozy » pour installer à la place un affrontement droite-gauche. En mettant son sort personnel dans la balance, il recrée les conditions d’un vote référendaire. Or l’antisarkozisme, c’est ce qui fonctionne le mieux pour mobiliser ses adversaires. Dans les sondages, c’est même la principale motivation des électeurs de F. Hollande…
S’il devait quitter la vie politique, qu’est-ce qu’il deviendrait ?
Difficile de l’imaginer. Il est avocat mais n’a presque pas exercé. On lui prête des envies de business, d’industrie ; c’est un domaine où il a un gros carnet d’adresses – peut-être trop gros, même – mais aucune expérience. Quant aux grandes conférences internationales, il parle beaucoup trop mal l’anglais. Alors il peut écrire ses mémoires, mais on ne peut le faire qu’une seule fois. S’il veut se donner le temps d’y réfléchir, il n’a pas d’autre choix que de gagner l’élection. Le problème, c’est que ça ne dépend plus vraiment de lui.