Taxe sur les résidences secondaires: "C'est comme attaquer une institution"

S’en prendre aux résidences secondaires, c’est comme attaquer Voltaire, Léon Marchand ou Louis XIV, c’est attaquer une institution. Symboliquement, c’est s’en prendre à une liberté. Celle de fuir. Fuir le quotidien, fuir l’ennui, fuir les habitudes.
Les résidences secondaires, c’est aussi ça : un endroit où on nous fout la paix. Vouloir les surtaxer, c’est du populisme. D’autant que les Français aiment particulièrement les maisons de campagne. Ils les aiment tellement que la France est championne d’Europe des résidences secondaires. Elles représentent plus de 10% du parc immobilier. Entre 2008 et 2022, ça n’a pas cessé de progresser. Alors ça baisse un peu depuis, mais ça reste considérable.
Profiter de la douceur de vivre
Le phénomène n’est pas nouveau. Le boom commence à la fin des années 1940 et explose jusqu’à la fin des années 1960. Ça correspond en gros à la présidence du général de Gaulle et fait partie de ce qu’on appelle "la société du loisir". L’idée, c’était de travailler moins et de profiter de la vie. Tout le monde avait une voiture. On partait pour la mer, on passait le week-end à la campagne. On construisait des stations balnéaires, comme la Grande Motte. Bref, on avait décidé que la douceur de vivre, c’était pas que pour les riches.
Parce qu’avant, les résidences secondaires étaient réservées à des gens très très privilégiés, et ça date de l’Antiquité. Au Ier siècle avant Jésus-Christ, à Rome, il y avait quasiment 1 million d’habitants. La densité de peuplement était proprement délirante. Même si les riches vivaient mieux que les pauvres, c’était pas très agréable. Donc les Romains avaient pris l’habitude d’avoir ce qu’on appelait des Villas, c’est-à-dire des domaines, souvent agricoles, à la campagne. Ça permettait d’échapper à la chaleur de la ville et surtout de fuir la promiscuité.
Un luxe réservé à très peu de personnes
L’aristocratie européenne va continuer cette tradition. Surtout à l’époque de la Renaissance. Par exemple, en France, les châteaux de la Loire, comme Chambord ou Cheverny, sont les symboles de cet état d’esprit. On fuit les villes pour conquérir et domestiquer la campagne. Ça allait en général avec un jardin à la française très travaillé. C’est en tout cas la version pour les super riches, mais ça va nous marquer durablement. Dès qu’elle le pourra, la bourgeoisie fera la même chose en se faisant construire des maisons à la campagne ou en bord de mer.
Enfin, les résidences secondaires, c’est loin d’être la norme. Bien sûr, ça reste un luxe réservé à très peu de personnes. Mais ce n’est pas seulement une question d’argent. Une résidence secondaire, ça peut être un appartement, une maison de famille, un camping-car. Mais dans tous les cas, c’est un endroit où le rythme est plus lent et où on est loin du travail. Un endroit où on n’a pas le sentiment d’être un esclave. Mais visiblement, c’est encore trop demander. Les résidences secondaires, en fait, c’est prioritaire.