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"Tout le monde se regarde": des Français trop complexés pour se rendre à la plage

Certains Français expliquent être très complexés, un sentiment qui les empêche parfois de se rendre à la plage ou à la piscine. Interrogée sur RMC, Anne-Sophie Joly, présidente du collectif national des associations d'obèses, a appelé à plus de bienveillance et de diversité sur les réseaux sociaux qui sont à l'origine de nombreux complexes.

"Je n'ai pas mis de maillot de bain depuis 18 ans". Depuis toutes ces années, Catherine n'ose plus aller à la plage qui se trouve à 10 minutes de son domicile dans l'Hérault. Elle confie sur RMC être "trop complexée" pour profiter de la baignade.

"Je suis déjà complexée de base, quand je suis arrivée dans le sud c'était l'horreur pour moi, tout le monde se regarde" estime-t-elle. Elle "envie" celles qui arrivent à aller à la plage "même si elles ont des fesses et de la cellulite".

Et Catherine n'est pas la seule à ne pas assumer son corps. En France, deux tiers des femmes se disent complexées, selon un sondage réalisé par YouGov en 2020.

Réseaux sociaux et publicité alimentent les complexes

Certaines font alors attention au moindre détail avant de s'étendre sur le sable. "On va s'épiler, regarder nos maillots, c'est pour nous-mêmes mais aussi pour éviter d'être regardées, passer partout", expliquent Charlotte et Kenza, deux franciliennes en vacances à Palavas-Les-Flots (Hérault).

Si elles "n'aiment pas spécialement leur corps", c'est en raison d'un manque de diversité sur les réseaux sociaux.

"On ne montre que des choses parfaites, avec des corps et des formes incroyables, on complexe d'un rien", confirment-elles. "On a toutes envie d'avoir le corps de certaines sur les réseaux sociaux".

Et ce ressenti est partagé par la majorité des femmes complexées. D'après l'étude YouGov citée plus haut, ce sont les publicités, la télévision et les réseaux sociaux qui sont principalement cités comme des sources de complexes.

"Regards, attitudes et petits mots assassins"

Anne-Sophie Joly, présidente du collectif national des associations d'obèses, dénonce aussi "les regards, attitudes et petits mots assassins" qui ciblent certaines personnes sur les plages. Elle explique avoir elle-même fait l'objet de nombreuses remarques.

"Les réflexions quand vous traversez la plage ou la piscine comme 'elle n'a pas honte?', on n'imagine pas l'ombre d'un instant les regards, les attitudes, les petits mots assassins que vous pouvez entendre quand vous passez" se souvient-elle.

Les complexes sont liés au regard des autres, à commencer par ceux des plus proches, selon elle. "Ca commence par la famille la plus proche, ses parents, oncles, tantes, [...] il y a les réseaux sociaux, l'école, le regard médical. Quand on n'est pas bien dans sa peau on va intérioriser des préjugés, qui vont être des facteurs aggravant sur l'estime de soi", explique Anne-Sophie Joly à l'antenne de RMC.

Elle appelle alors à "lutter contre les préjugés", ainsi qu'à plus de bienveillance et de diversité sur les réseaux sociaux et dans les médias.

"A force de bombarder les gens d'images de corps dits parfaits aux yeux de la société, on exclue tous les autres".

Une campagne pour "le droit de toutes les femmes à profiter de l'espace public"

C'est justement en faveur de la diversité des corps sur les plages que le ministère de l'Egalité espagnol a récemment lancé la campagne "l'été est aussi à nous", s'attaquant au mythe du corps parfait et aux complexes qui en découlent. Sur l'image de campagne, des femmes avec des vergetures, des bourrelets, des cheveux roses, ou encore ayant subi une masectomie prennent la pose.

"L'objectif de la campagne est de revendiquer la diversité corporelle et le droit de toutes les femmes à profiter de l'espace public", explique le ministère sur Twitter.

"J'ai compris que je n'étais pas Brad Pitt"

Avec les années, certains ont réussi à dépasser leurs complexes. C'est le cas de Michelle, une septuagénaire qui assume de porter un maillot deux pièces.

"Quand j'étais adolescente j'étais très menue, j'enviais les filles qui avaient des cuisses normales, une poitrine... Et puis finalement avec les années je suis ravie, je me mets en deux pièces ça ne me gêne pas", commente-elle au micro de RMC.

Même chose pour Jean-Pierre, auditeur RMC, qui explique avoir "compris depuis longtemps" qu'il n'était "pas Brad Pitt ou George Clooney". Annabelle part elle "du principe qu'on est tous différents".

"J'ai 31 ans, deux enfants, mon corps a vécu deux grosssses, je pars du prncipe qu'on est tous différents, hommes et femmes, et la vie passe par là. Je trouve ça très dommage de se restreindre ou de partir du principe que parce qu'on ne correspond pas aux standards de beauté on devrait se priver de plages, de piscine, c'est dommage".

Et même si elle n'est "pas à l'aise à 100% avec son corps", elle appelle les vacanciers à s'assumer: "On s'en fiche que vous ayez un petit bidon, on n'a qu'une vie!".

*Etude Omnibus réalisée du 26 au 28 juin 2020 auprès de 1 003 femmes représentatives de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas

Lucile Pascanet et E.R.