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Crash du Rio-Paris: le BEA a-t-il caché certains éléments ?

Alain Bouillard, chef du département investigation du BEA, était l’invité de Chirstophe Jakubyszyn ce jeudi sur RMC.

Alain Bouillard, chef du département investigation du BEA, était l’invité de Chirstophe Jakubyszyn ce jeudi sur RMC. - -

Le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) a-t-il supprimé des éléments défavorables à Airbus, dans l'enquête sur le crash du vol Rio-Paris ? En colère, les familles des victimes lui reprochent de ne pointer que la responsabilité des pilotes. Invité ce jeudi sur RMC, le chef du département investigation du BEA se défend.

Pour ne pas mettre en cause Airbus, le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) a-t-il sciemment dissimulé une recommandation de sécurité dans l'enquête sur le crash du vol AF447 Rio-Paris ? Question posée par les familles des victimes, en colère, qui reprochent au BEA de n'avoir mis l'accent que sur les comportements des pilotes. Le SNPL, principal syndicat de pilotes français, a d’ailleurs annoncé hier mercredi qu'il suspendait sa participation à l'enquête pour dénoncer la suppression de cette recommandation dans le rapport du BEA.

Selon le journal La Tribune, certains passages du rapport d'enquête, défavorables à Airbus, ont été supprimés, notamment concernant le mauvais fonctionnement des alarmes de décrochage.
L’accident de l’Airbus A330 avait fait 228 victimes le 1er juin 2009.

« Je suis fonctionnaire, j’ai mon honneur, mon intégrité… »

Alain Bouillard, chef du département investigation du BEA, était l’invité de Chirstophe Jakubyszyn ce jeudi sur RMC. A-t-il subi des pressions pour supprimer des éléments ? « Pas du tout, se défend-il, visiblement touché par la question. Depuis que je fais ce métier, je n’ai jamais subi la moindre pression. Je fais ce métier par conviction, j’essaie d’apporter toute mon énergie à l’amélioration de la sécurité. Je suis fonctionnaire, je pourrais très bien rendre mon tablier du jour au lendemain si on me forçait la main ; mon emploi ne dépend pas de ça. J’ai mon honneur, mon intégrité ; je ne vois pas comment je pourrais vivre en subissant des pressions et en enlevant dans un rapport des éléments qui me paraitraient essentiels à la sécurité ».

Pour écouter le podcast intégral de l'interview d’Alain Bouillard chez Jean-Jacques Bourdin, cliquez ici.

« Pas sûr que le BEA n’ait pas subi de pression »

Mais de son côté, Robert Soulas, président de l'association Entraide et Solidarité AF447, l'association des familles de victimes, reste plus que sceptique : « Le rôle du BEA n’est pas facile. Ils prétendent ne pas subir de pressions ; je n’en suis pas si sûr. Ce que nous souhaitons, ce sont des informations fiables. D’apprendre comme ça, qu’une recommandation de sécurité a été différée, c’est grave, dans la mesure où il est sans doute probable qu’il faille l’appliquer très rapidement, de manière à parer toute éventualité dans un A330 ou un A340 ».

« Pour des raisons diplomatiques et industrielles, le BEA ne peut pas tout dire »

Alors, le BEA est-il vraiment indépendant ? Sur le papier, oui. Le directeur du BEA est nommé pour 7 ans, c'est suffisamment long pour ne pas subir de pression, et il ne peut recevoir aucune instruction sur le déroulement des enquêtes.
Mais le BEA dépend directement du ministère des Transports, un ministère qui cherche évidemment aussi à protéger les grands groupes industriels français comme Airbus ou Air France.
Il y a quelques semaines, le BEA s'était dépêché de publier des informations sur le crash Rio-Paris mettant en cause l'équipage, juste avant le salon du Bourget. Un salon capital pour les ventes d'Airbus.
Les experts du BEA sont des ingénieurs de haut niveau, d'anciens pilotes de ligne. Leur expertise technique est reconnue par tout le monde. Mais pour un député qui a enquêté sur le BEA : « Il y a des moments où ils ne peuvent pas tout dire pour des raisons diplomatiques, comme pour Charm el Cheikh, et d'autres moments où on n'a pas tout dit parce qu'il y avait des priorités industrielles fortes ».

La Rédaction, avec Yannick Olland