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Travail de nuit des agents de propreté: le secteur "veut que les conditions s'améliorent"

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Le président de la Fédération des entreprises de propreté, Philippe Jouanny, alerte sur RMC ce jeudi sur le conditions de travail des salariés du secteur. Il dénonce notamment le fait que les horaires décalés soient devenus la norme et appelle l'État à l'exemplarité.

La Fédération des entreprises de propreté, qui regroupe 15.000 entreprises et 605.000 salariés, veut changer les habitudes du secteur. "On veut que les conditions de travail de nos salariés soient améliorées", clame sur RMC son président Philippe Jouanny.

Selon la Fédération, 93% des marchés publics ne proposent pas d'horaires de journée et continus pour le nettoyage de leurs locaux. Un chiffre qui illustre bien les difficiles conditions de travail des agents d'entretien, souvent amenés à effectuer un premier travail très tôt dans la journée avant que les entreprises ouvrent, puis un deuxième service très tard lorsque ces dernières ont fermé.

Des horaires épuisants

C'est la principale chose que Leïla, agent de propreté, aimerait changer dans son travail. "Je sors de chez moi à 6 heures du matin pour prendre le premier bus pour rejoindre mon travail, parce qu'à 7h30, on commence", raconte-t-elle, avant d'enchaîner sur une journée qui finit en général 10 heures plus tard.

"Ce n'est pas évident. Ce serait mieux des journées de 9 heures à 16 heures", ajoute-t-elle.

Dans les faits, ces contrats en journée sont rarissimes. "La part est minime, c'est peut-être de 5%", estime Laurent Ruh, directeur d'une société de nettoyage en Alsace. Pourtant, "il n'y a pas de règles" mais plutôt "des usages, une culture" déplore Philippe Jouanny au micro de Charles Matin, c'est-à-dire que ces horaires décalés sont petit à petit devenus une norme dans le secteur.

"Les entreprises ont encore du mal à accepter l'agent de nettoyage pendant leurs horaires de travail. Pourquoi? Parce qu'ils partent du principe que ça risque de les déranger dans leur quotidien", analyse Laurent Ruh.

Un mauvais argument selon Stéphanie Pauzat, elle aussi gérante d'une entreprise de propreté: "Vous savez pour faire un bureau, il n'y a pas besoin d'une heure. On va voir un collègue pour un dossier, on va prendre un café et discuter avec des collaborateurs. Pendant ce temps-là, l'agent fait le bureau. C'est ces freins-là qu'il faut qu'on arrive à lever."

L'État appelé à montrer l'exemple

D'autant plus que les agents de propreté sont "formés au savoir-être pour faire en sorte de ne pas déranger", assure Philippe Jouanny, le président de la Fédération des entreprises de propreté. Ce dernier peut en plus s'appuyer sur un taux de satisfaction élevé:

"89% des clients qui sont passés au travail en journée n'ont pas l'intention de revenir en arrière."

Parmi eux, le ministère du Travail et de l'Emploi, où la ministre Astrid Panosyan-Bouvet "a mis en place le travail en journée et en continu", selon Philippe Jouanny. Il a "remercié" la ministre qu'il juge "vertueuse" sur le sujet: "C'est grâce à elle que les choses peuvent avancer du côté de l'État."

Comme écrit précédemment, pourtant, 93% des marchés publics ne suivent pas l'exemple du ministère, alors que "dans la profession, 25% de la commande est publique", selon Philippe Jouanny, qui appelle l'État "au sens large" à prendre ses responsabilités.

Un secteur qui a du mal à recruter

Les horaires décalés plaisent toutefois à certains agents d'entretien. "Je me lève un petit peu avant 4 heures. Je pars travailler et à 11 heures du matin, je suis chez moi. Je peux être à la sortie de l'école", raconte Lucile, qui travaille depuis 11 ans dans le secteur. Elle ne souhaite pas changer d'amplitude horaire.

Cela tombe bien, puisque la Fédération des entreprises de propreté ne souhaite "pas l"imposer". Philippe Jouanny souligne que cela se ferait "sous forme de volontariat au près des salariés" et que ces horaires seraient assignés à "ceux qui le veulent".

L'idée, aussi, derrière ce mouvement, c'est de pouvoir attirer plus de candidats dans un secteur qui peine à recruter. "Allez séduire un jeune en lui disant que son travail, ça va être de travailler 3 heures le matin et de revenir le soir pour 3 heures", conclut Philippe Jouanny, qui s'inquiète de cette situation.

Alfred Aurenche et Tanguy Roman Clavelloux