RMC
Transports

Une écotaxe poids lourds pour financer le train? "Ce ne serait pas anormal", selon le PDG de la SNCF

placeholder video
Alors que le gouvernement a lancé sa grande conférence sur le financement des mobilités jusqu'en 2040, le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou réitère ce jeudi sur RMC-BFMTV la possibilité de taxer les poids lourds afin de financer le ferroviaire. "On ne peut pas accepter un euro de charge ou de fiscalité supplémentaire" rétorque le secteur du transport routier.

Pour financer les mobilités jusqu'en 2040, l'écotaxe pourrait faire son retour alors que les déplacements des Français et le transport de marchandises nécessiteront d'ici 2030 environ 100 milliards d'euros, fonctionnement et investissements confondus.

Pour contribuer à ce financement donc, certaines voix évoquent un retour de l'éco taxe. C'est le cas du PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou: "Les camions défoncent les routes, ils polluent abondamment", pointe-t-il

Ce jeudi sur RMC-BFMTV, il a réaffirmé qu'une "taxe poids lourds", à l'instar de celle instaurée en Allemagne qui rapporte "8 milliards d'euros par an", était selon lui une "possibilité." "En 2028, il faudra 1 milliard d'euros de plus dans le réseau ferroviaire", a-t-il souligné, pointant qu'il n'était pas "anormal" que le secteur polluant, entre autres les camions, "finance le non-polluant qu'est le ferroviaire."

Et dans ce système, les camions étrangers pourraient être davantage ciblés que ceux des entreprises françaises. "Les camions étrangers font le plein au Luxembourg puis traversent et défoncent les routes. On a aucun gain. On a que les nuisances. Ils polluent abondamment", estime le PDG de la SNCF. "La cible, c'est le transit européen qui abîme le patrimoine".

Face à Face : Jean-Pierre Farandou - 22/05
Face à Face : Jean-Pierre Farandou - 22/05
20:21

Un "R-Pass" en Alsace à partir de 2027

En Alsace justement, la région est favorisée par les camions étrangers plutôt que l'Allemagne, afin d'éviter d'avoir à payer l'écotaxe. Conséquence, en octobre 2024, les élus de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) ont voté pour l’instauration d’une taxe poids lourds qui vise à diminuer la pollution et le trafic autoroutier.

La collectivité entend ainsi imposer à partir de 2027, une taxe baptisée "R-Pass", de 0,15 euro par kilomètre pour les camions de plus de 3,5 tonnes circulant sur l’axe nord-sud (A35 et A36) et sur deux autres routes reliant cet axe à l’Allemagne.

"On pourra faire des budgets pour la route à peu près à hauteur de 100 millions d'euros par an. Il y a plus de 50% du réseau qui nécessite des travaux d'importance exceptionnelle, y compris la chaussée. S'il n'y a pas de contributions, on ne sera pas en mesure de garantir des infrastructures circulables", a justifié auprès de RMC Thibaud Philipps vice-président de la région Grand Est, délégué au transport.

L'invité de Charles Matin : Vers un retour de l'écotaxe ? - 22/05
L'invité de Charles Matin : Vers un retour de l'écotaxe ? - 22/05
6:20

Six milliards d'euros de plus par an si l'écotaxe n'avait pas été supprimée

Selon un rapport de la Cour des comptes, l’écotaxe telle qu’elle avait été pensée en 2013 (avant d'être abandonnée) pourrait rapporter plus de 700 millions d’euros par an à l’État. Si elle avait été maintenue, "on aurait six milliards de plus par an actuellement, donc on n'aurait pas besoin de faire une conférence", a rappelé début mai auprès de l'AFP Dominique Busserau, président de la conférence "Ambition France Transports".

Hors de question cependant pour Olivier Poncelet, délégué général de l'Union des entreprises de transport et logistique de France (Union TLF), qui se demande, ce jeudi sur RMC Story, "si on n'a pas en France d'autres idées que de taxer les entreprises et les gens qui travaillent?"

Le secteur du transport routier veut une harmonisation européenne

"Le transport routier en France a les marges les plus faibles d'Europe. Il faut au contraire lui redonner de la compétitivité. Ce qu'on demande, c'est d'avoir un niveau de taxation équivalent à la moyenne européenne. Il faut absolument créer un niveau de concurrence loyale, sur les normes environnementales, fiscales et sociales", développe-t-il au micro de Charles Matin.

"Battez-vous avec nous, une vraie équipe France, plutôt que de se taxer les uns et les autres. "On ne peut pas accepter un euro de charge ou de fiscalité supplémentaire, les transporteurs ne pourront pas", plaide Olivier Poncelet. "Soit c'est un énième impôt de production et on tue l'industrie française, soit on ça se retrouve dans les caddies des Français."

Nourredine Ziane, chef d'entreprise dans le secteur routier, s'émeut lui aussi de cette possibilité, alors que son activité est déjà en baisse en 2025: "Comment je vais faire? Ça va aggraver la situation, ça va augmenter nos prix, celui de nos clients. À la fin, c'est le consommateur qui va payer."

Léo Manson avec Pierre Bourgès