Sur la route des réfugiés - Un mois après, qu'est devenue la famille Alshaikh?
Les Alshaikh sont aujourd'hui dans la campagne autrichienne, près de Salzbourg, à Scharnstein plus exactement. Un village de 5.000 habitants au milieu des montagnes et des grands lacs. Installés dans une maison avec jardin rien que pour eux. Majd, le père de famille, n’en revient toujours pas: "On n’entend plus les balles siffler comme en Syrie. Ici on entend les oiseaux et le bruit de la rivière qui coule au fond du jardin. 90% des réfugiés n’ont pas cette chance. C’est le paradis pour moi".
La générosité d'Herbert et Martina
Cette chance, ils la doivent à la générosité de deux volontaires autrichiens: Herbert et Martina. Les Alshaikh les avaient rencontrés en Slovénie. Juste avant la frontière autrichienne, ce couple d’une soixantaine d’années leur avait offert le gîte et le couvert pour la nuit. Et ils leur avaient fait une offre incroyable: les héberger gratuitement pendant 1 an dans leur maison secondaire. La famille voulait rejoindre la Hollande. C’est ce qu’ils ont fait. Mais après une semaine dans un camp là-bas, ils ont changé d’avis.
Cela fait donc 3 semaines qu’ils sont installés à Scharnstein. Et ils se sentent déjà chez eux. La photo de mariage trône sur une petite commode à côté de quelques photos de famille. Il sont déjà obtenu une carte de résident, document essentiel dans leur intégration. Cette carte blanche signifie que leur demande d’asile est en cours.
Elle leur permet notamment d’avoir une couverture santé, mais pas encore de travailler ni même de conduire une voiture. Ils l’ont obtenu en seulement 2 semaines et c’est très exceptionnel. Les délais sont plus proches de 2 mois. Herbert et Martina ont fait jouer leurs relations pour accélérer les procédures: "On aide une famille sur laquelle on peut se concentrer et leur apporter toute l’aide qu’on peut. C’est plus simple. On voulait leur offrir un abri parque c’est une si belle famille. Et ils méritent un nouveau départ. Je pense que d’ici 4 mois, ils auront leur statut de réfugiés et pourront circuler librement et travailler bien sûr".
"On mélange l'anglais et l'allemand"
La priorité aujourd'hui est de s’intégrer. Mais il faut d’abord parler la langue. Rose, l’aînée qui a 7 ans, va à l’école depuis 2 semaines. Elle a 4h de cours d’allemand par semaine. Un professeur pour elle toute seule et elle sait déjà compter jusqu’à 20: "C’est un peu dur mais on arrive quand même à se comprendre avec mes copains de l’école. On mélange l’anglais et l’allemand. Je ne comprends pas tout mais ça va je me débrouille. Et l’école ici c’est mieux qu’en Syrie. C’est plus propre et les élèves sont plus calmes. Et puis je préfère l’emploi du temps ici, il y a moins de devoirs à la maison !"
Hadi, son petit frère, va au jardin d’enfant. Il fait des progrès aussi. Et la petite dernière reste avec sa mère, Rana, à la maison. Les parents eux aussi font tout pour apprendre vite. Tous les samedis, c’est Pia, une jeune étudiante autrichienne qui assure les cours bénévolement pour Rana et Majd: "Je leur ai appris les bases. Pour qu’ils puissent demander un renseignement, au supermarché par exemple. La semaine dernière ils ne comprenaient rien. Aujourd’hui ils sont déjà très forts".
Les parents essaient de retrouver un semblant de vie sociale. Le week-end dernier, ils sont allés à la fête de l’école pour rencontrer les autres parents d’élèves et les habitants du village.
"J'essaie de renvoyer l'ascenseur"
Leur histoire reste très présente et aujourd’hui ils essaient d’aider à leur tour. Samedi dernier, avec Herbert et Martina et d’autres volontaires autrichiens, ils ont participé à des collectes de vivres à destination des réfugiés. Pour Majd, le père de famille, c’est le moins qu’il puisse faire: "On est en train de remplir cette voiture de vêtements chauds, de médicaments et de nourriture pour les réfugiés qui sont bloqués à la frontière avec la Slovénie. Il fait très froid en ce moment. Je réfléchis comme un ex-réfugié qu’on a aidé et j’essaie de renvoyer l’ascenseur".
Cette nouvelle vie, loin des bombes de Syrie et des privations, ils en rêvaient. Ils ont parcouru plus de 5.500 kilomètres à pieds, en bus, en train ou en bateau pour y arriver. Elle est désormais bien réelle. Majd attend maintenant ses papiers de résident permanent pour trouver du travail, dans un cabinet d’architecte, il l’espère. Leurs liens avec la Syrie aujourd’hui se résument à leurs parents restés là-bas, qu’ils appellent tous les jours ou presque. Aux plats traditionnels qu’ils cuisinent et à la musique qu’ils chantonnent le matin au réveil en regardant les montagnes autrichiennes par la fenêtre.
Revivez le périple de la famille Alshaikh ICI.