Guerre en Ukraine: faut-il s’inquiéter d’une coupure internet en Europe?
C’est la colonne vertébrale de l’internet mondial. Les câbles sous-marins relient tous les continents à internet. Un câble coupé, c’est un risque d’internet dégradé voire de blackout pour nos ordinateurs, nos smartphones, et globalement toute notre économie, les échanges financiers et de tout ce qui dépend complétement d’internet.
Une arme potentielle pour la Russie
Une coupure fait clairement partie des armes potentielles à la disposition de la Russie. Interrogé récemment à ce sujet par la Tribune, le directeur des réseaux internationaux d’Orange, explique que sans ces câbles, il n’y aurait tout simplement plus d’internet européen.
99% du trafic internet mondial passe, en effet, par ces câbles en fibre optique, fins comme des cheveux et protégés par un gros tuyau de plastique posés au fond des océans pour relier les continents, comme un réseau veineux.
Un risque de blackout total faible
Il y en a 420 dans le monde, pour une distance d’1,3 million de km. Par conséquent, le risque d’un blackout total en Europe, qui est bien reliée, est quand même faible: il faudrait couper plusieurs de ces câbles en même temps, ce qui demanderait une opération très bien organisée.
Mais certains événements passés incitent à la prudence. Ces coupures, elles arrivent parfois, accidentellement (arrachés par des chalutiers par exemple, ou alors par un volcan). Les conséquences sont parfois lourdes : en 2007, des pêcheurs vietnamiens coupent un câble sous-marin. Le pays perd 90% de sa connectivité pendant trois semaines. Plus récemment, un volcan a sectionné le seul câble qui relie les îles Tonga à internet, qui se sont retrouvées coupées du monde. Cela montre l’importance de ces infrastructures.
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Un réseau fragile
Ces câbles sont donc stratégiques et fragiles. Un sujet d’inquiétude pour les autorités du monde entier depuis des années. En France, le sujet a été abordé en 2017 dans un rapport du secrétariat général de la Défense et de la sécurité nationale, qui estime que les câbles sous-marins constituent "de potentielles cibles dans le jeu des puissances."
La France est d’ailleurs en train de se doter de drones et de robots sous-marins, sortes de vigiles des abysses pour détecter au plus vite une anomalie.
Le passif de la Russie
Pourquoi s’inquiéter d’une coupure de la part de la Russie ? Tout simplement, parce que le régime de Vladimir Poutine a un passif sur le sujet. La Russie est déjà soupçonnée d’avoir déjà utilisé des coupures de câble lors de l’annexion de la Crimée en 2014.
Ce qui sème aussi le doute, c’est l’activité marine de la Russie ces derniers mois et même quelques jours avant la guerre, avec des navires militaires et espions russes, équipés de sous-marins, qui se baladent au large des côtes irlandaises, pile à l’endroit où se trouvent deux câbles transatlantiques. Drôle de coïncidence comme le notent certains experts en cybersécurité.
L’Ukraine prend la menace du blackout au sérieux. Elle a demandé à Elon Musk de déployer en urgence son réseau de satellites internet Starlink au-dessus du pays, ce qui a été fait. Une solution de secours si le grand coup de ciseau devait avoir lieu.