Lutter contre les fake news sur Internet, c'est un vœu pieux

- - AFP
Nicolas Vanderbiest, chercheur et bloggeur spécialiste de l'e-réputation pour les entreprises et les crises 2.0.
"Lutter contre les fake news, c'est un vœu pieux. C'est juste dire: 'on va faire quelque chose'. Mais ça a au moins le mérite de cadrer un phénomène qui prend de l'ampleur. Maintenant, au-delà de cette annonce, il va falloir définir ce qu'est une fake news: ça peut être une rumeur, de la propagande, une information non-vérifiée… C'est un terme qui englobe tellement de multiples phénomènes que finalement, il ne veut rien dire.
Or, quand on va faire une loi il va bien falloir définir ce que c'est. Est-ce que, quand l'affaire Penelope Fillon sort dans le Canard Enchaîné, c'est une fake news parce qu'elle n'a pas encore été confirmée à 100% à ce moment-là? Est-ce qu'une activité de propagande, c'est une fake news? Quand on a le lendemain des Macron Leaks un article de Sputnik se sert de tweets de l'extrême droite pour montrer un soi-disant effet de gêne des Français, est-ce une fake news alors que ces tweets sont réels? Non, c'est une para-information. Donc c'est très compliqué de dire ce qu'est une fake news, et juridiquement cela va poser problème.
"La loi ne peut suffire"
L'autre difficulté, c'est de savoir que faire après la mise en place de la loi. Pour s'en prendre par exemple à un organe de propagande qui paye des publicités sur Facebook dans le but d'influencer l'élection américaine, vous devez saisir un juge, qui va devoir enquêter, puis statuer… le temps que cela soit fait, ils auront déjà créé autre chose et seront déjà ailleurs. Et une fois qu'on a une fake news, comment punir son auteur? Faut-il aussi punir les internautes qui l'auront relayée? Il va vraiment falloir voir ce qu'il y a derrière cette annonce d'Emmanuel Macron.
Le phénomène global des fake news est tellement important qu'il n'y aura qu'une réponse systémique à adopter, qui ne pourra pas être simplement législative. On aura besoin des journalistes, de fact checking, d'organismes de surveillance pour surveiller les réseaux sociaux… On aura besoin de cadres législatifs, des juges… On aura besoin d'une réponse globale, pas seulement d'une loi."