TER supprimés faute de conducteurs: "Le recrutement, ça ne s'improvise pas du jour au lendemain!"

Des TER supprimés faute de conducteurs. (Photo d'illustration) - -
Des TER supprimés faute de conducteurs. En région Nord-Pas-de-Calais-Picardie et en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, la SNCF va mettre en place un "plan de transport adapté" (PTA) dans les prochaines semaines. En Picardie, le plan s'étale du 29 février au 16 avril et du 7 mars au 16 avril. Certains trains seront remplacés par des bus, mais pas de manière systématique.
La SNCF assure que dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, le plan concerne "moins de 0,5%" de ses clients et que seuls "30 trains en moyenne par jour sur 1 250 trains" sont concernés. Le député PS des Ardennes, Christophe Léonard, a également fait état de la suppression, à compter du 3 avril, de six trains dans son département, en provenance ou à destination de Charleville-Mézières, conséquence selon lui du détachement "de dix conducteurs ardennais en Ile-de-France".
"Des gens vont se retrouver sans moyen de transport"
Qu'en pensent les associations d'usagers de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie? RMC leur a tendu son micro, et tous dénoncent un manque d'anticipation de la part de la SNCF. Plusieurs dizaines de trains supprimés par jour à partir de lundi prochain sur des lignes secondaires en Picardie, pour Christiane Dupart, déléguée régionale de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT), la situation est inadmissible.
"Des gens vont se retrouver sans moyen de transport, puisque tout le monde ne pourra pas se rendre dans une autre gare plus importante", peste-t-elle sur RMC. "Ceux qui vont prendre un car vont mettre beaucoup plus de temps. Donc c'est très problématique pour beaucoup d'usagers, en particulier le matin, où il y a des suppressions".
"Beaucoup de désistements"
En cause, le manque de conducteurs de trains. Jacky Lion, directeur régional SNCF Mobilités, donne une explication: le recrutement a été plus difficile que prévu ces dernières années:
"Lorsqu'on présente aux nouveaux candidats ce qui va avec ce métier, c’est-à-dire les contraintes qui l'accompagnent - commencer tôt, finir tard, travailler le samedi, le dimanche, les jours fériés, ne pas dormir le soir à la maison, puisque dès fois on est découché - eh bien, dès cette première étape, nous avons beaucoup de désistements".
Ceux qui persévèrent doivent alors suivre une formation exigeante. Durée: 18 mois. Il faut apprendre par cœur une grande quantité de notions, notamment sur des questions de sécurité. En Nord-Pas-de-Calais-Picardie, par exemple, seulement une personne sur deux est allée au bout de la formation en 2015. Du jamais vu, selon le directeur régional de la SNCF.
"Ça fait des mois et des mois que ce problème existe"
Enfin, beaucoup de candidats ne franchissent pas l'étape de l'examen médical. Grace à de récentes avancées scientifiques, la consommation de psychotropes, comme le cannabis, incompatible avec le métier de conducteur, est mieux détectée. Gilles Laurent, vice-président de la FNAUT, dénonce l'amateurisme, en matière de recrutement, de la SNCF.
"Ça fait des mois et des mois que ce problème existe: c'est pas nouveau", s'agace-t-il au micro de RMC. "Ça a été signalé, il y a déjà eu des réunion à la région. Et puis on se rend compte que ça continue comme avant. Ces histoires d'effectifs et de personnel, ça ne s'improvise pas comme ça du jour au lendemain. Ça supposait d'y penser en temps utile et de faire ce qu'il fallait pour que ça marche! Je ne connais pas beaucoup d'entreprises qui ont cette excuse-là, de dire : 'on est désolé, on ne sait plus faire parce que l'on n'a pas le personnel qu'il faut".
"Nous ne pouvons pas abaisser le niveau d'exigences"
"Pendant six mois on va vivre une vraie baisse du niveau de service", s'est alarmé à son tour Boris Ravignon, maire LR de Charleville-Mézières, dans les Ardennes, sur RMC. "Moi, je m'interroge vraiment sur la façon dont est gérée l'entreprise SNCF. La plupart des entreprises se donnent du mal pour trouver des clients et donner du travail à leurs agents. Là, la SNCF a du mal, semble-t-il, à trouver des agents pour satisfaire ses clients, nombreux, qu'elle a déjà".
"Ce que nous faisons dans l'entreprise, c'est le maximum", lui a répondu tout de go Jacky Lion, directeur régional SNCF Mobilités. En matière de recrutement de personnel roulant, "on ne peut pas abaisser le niveau d'exigence", a-t-il plaidé. "Nous nous évertuons au quotidien à faire au mieux pour ne pas impacter les utilisateurs", a-t-il promis, avant de conclure: "encore une fois, c'est temporaire".
Pour rattraper le retard en termes d'effectifs, le groupe ferroviaire annonce la formation de 1400 nouveaux conducteurs en 2016.