"Trafic d'organes, prostitution... Ca ne sort pas de nulle part": la fausse rumeur des enlèvements d'enfants ancrée à Clichy-sous-Bois
Vingt personnes ont été interpellées dans la nuit de lundi à mardi en Seine-Saint-Denis après des violences visant des Roms, désignés par des rumeurs sur les réseaux sociaux comme étant à l'origine d'enlèvements d'enfants.
Lundi à partir de 20h, "plusieurs rixes et violences" ont eu lieu à Clichy-sous-Bois puis à Bobigny "prenant à partie des personnes de la communauté du voyage". Après ces violences, 19 personnes ont été placées en garde à vue. il s'agit principalement de jeunes de quartier, dont deux mineurs, mais aussi des hommes plus âgés, d'une quarantaine d'années, parfois pères de famille.
"Il y avait des jeunes, des vieux... Ils avaient des bâtons. Ils n'ont pas tapé sur les femmes et les enfants, mais ont attaqué les hommes et les ont dégagé" confie Marco, qui a assisté à la scène.
Ces violences font suite à la multiplication, sur les réseaux sociaux, de messages alarmants évoquant des tentatives d'enlèvements d'enfants ou adolescents par des personnes circulant en camionnette blanche dans plusieurs localités d'Ile-de-France, en particulier des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis. Pourtant, aucune enquête n'a été ouverte pour des enlèvements de mineurs, affirme le parquet de Bobigny. Plusieurs signalements ont bien été reçus par les services de police depuis le 8 mars, mais après vérification, il n'y a eu aucun enlèvement ni tentative d'enlèvement avéré.
Pourtant la "fake news" s'est largement propagée sur les réseaux sociaux, allant donc jusqu'à provoquer ces expéditions punitives lundi soir. Et certains habitants de Clichy-sous-Bois y croient dur comme fer, comme Mervé, que RMC a rencontré:
"Ca parle de partout. Ils sont passés avec des camionnettes, ils ont pris des petites filles pour du trafic d'organes, de la prostitution. Il y a un truc, ils ne vont pas sortir ça de nulle part!"
"Des rumeurs pour déshumaniser les Roms"
"Il n'y a jamais eu d'enlèvement ou de kidnapping" dénonce Anina Ciuciu, avocate et porte-parole de l'association La voix des Roms. "Ca a pris des proportions extrêmement graves. Il y a plusieurs personnes qui ont été violentées et elles ont peur d'être attaquées, lynchées, tabassées" dénonce-t-elle sur RMC.
Face à Jean-Jacques Bourdin, elle confie que ces "rumeurs font en sorte de déshumaniser les Roms". "Je m'adresse aux personnes qui auraient pu être effrayées par cette rumeur: il faut se réveiller de ce cauchemar! (...) On demande au ministère et au préfet une présence policière immédiate pour protéger les Roms" a conclu Anina Ciuciu.
La préfecture de police appelle aujourd'hui à ne plus relayer cette fausse information.