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"Le décrochage scolaire est l'antichambre de la délinquance": l'escalade de la violence dans les quartiers populaires est-elle inévitable ?

Depuis le début de l'année, 304 fait de fusillades et de règlements de compte ont été recensés. Plus qu'en 2019 malgré deux mois de confinements.

Deux jeunes hommes de 17 et 25 ans ont été tués et un troisième, âgé de 16 ans, blessé dans une fusillade à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) dans la nuit de lundi à mardi. Selon les premiers éléments, les deux victimes auraient été abattues dans une cave de la cité Soubise. 

"Les règlements de compte sont récurrents dans ce quartier. Il y a des bagarres, des blessés par balle et parfois des morts", explique ce mercredi sur RMC Driss Aït-Youssef, docteur en droit public, spécialiste de la sécurité globale, président de l'institut Léonard de Vinci et habitant de Saint-Ouen.

Le 4 juillet déjà un homme âgé d'une trentaine d'années avait été blessé par balles dans ce même quartier sur fond de trafic de stupéfiants. Le Parisien recensait mercredi 304 faits de fusillades et de règlements de compte depuis le début de l’année. L’escalade de la violence est-elle incontrôlable alors que les homicides volontaires et tentatives d’homicides sont en hausse par rapport à 2019 malgré deux mois de confinement ? 

"Pour ces terrains, il y en a qui sont prêts à tuer

"C’est bien de mettre des policiers mais ils ne pourront pas tout. Il faut une alternative à l’échec scolaire. Il faut régler la question de l’accompagnement et de la monoparentalité. Cela n’excuse pas tout ça mais il faut des réponses. L’antichambre de la délinquance c’est le décrochage scolaire", précise Driss Aït-Youssef avant d'évoquer la situation particulière de la ville de Saint-Ouen: "Elle est frontalière de la capitale et des entreprises s’y sont implantées. Vous avez des cadres supérieurs qui viennent s’approvisionner en cannabis et parfois en cocaïne, rendant les terrains lucratifs et pour ces terrains, il y en a qui sont prêts à tuer comme c’est le cas depuis de nombreuses années".

Mais selon lui, les derniers meurtres ne correspondent pas au schéma classique de récupération d’un territoire. Il ajoute que le profil d'une des victimes, Sofiane 25 ans, ne correspondrait pas non plus: "C’était un garçon avec un parcours difficile mais qui avait essayé ces dernières années de trouver une autre alternative à la drogue et la rue. Il était notamment impliqué dans la vie locale associative et n’hésitait pas à se prendre en photo avec des élus. Il n’avait pas le profil du dealer, celui qui rase les murs, vit la nuit et n’apparaît sur aucune photo".

Onze personnes ont été placées en garde à vue pour meurtre et tentative de meurtre en bande organisée dans le cadre de l'enquête sur le double homicide, a assuré le parquet de Bobigny. Mardi dans la soirée, seules deux étaient toujours en garde à vue.

G.D.